ntroduction, mais encore de
recommandation; cette affaire est pour moi capitale, ma fortune est en
jeu.
--Alors je vous ferai cette lettre.
--Voulez-vous la faire tout de suite? dit le baron, tendant une plume
pleine d'encre.
--Volontiers.
Il etait deux heures cinquante-huit minutes.
Le baron tenait ses yeux attaches sur la pendule, et, malgre son flegme
ordinaire, il etait agite par des mouvements impatients.
Trois heures sonnerent, le colonel ecrivait toujours.
A ce moment, le baron entendit un bruit de pas sur le gravier de la
serre, puis presqu'aussitot une porte se referma dans un chassis en fer
et un verrou glissa dans une gache.
Beio etait entre derriere Carmelita.
Instantanement un cri retentit:
--Lorenzo!
Le colonel leva brusquement la tete, la voix qui avait crie etait celle
de Carmelita.
--Oui, moi, repondit une voix que le baron reconnut pour celle de Beio.
--Ici!
--Vous n'avez pas voulu me recevoir chez vous, vous n'avez pas repondu a
mes lettres; je vous ai suivie, et me voila. Maintenant nous allons nous
expliquer.
--Et quelle explication voulez-vous?
--Une seule: que vous me disiez pourquoi vous ne voulez pas pour votre
mari celui que vous avez bien voulu pour votre amant.
Le colonel s'etait leve et il se dirigeait vers la serre.
Le baron le retint par le bras:
--Ecoutez, dit-il.
Mais le colonel se degagea.
--Je vous ai dit que j'empecherais ce mariage, continuait la voix de
Beio, et je l'empecherai, dusse-je aller dire au colonel Chamberlain que
vous etes ma maitresse?
Le colonel etait arrive contre le store; d'un brusque mouvement, il le
remonta.
Devant lui, se tenaient Beio et Carmelita en face l'un de l'autre.
A la vue du colonel, ils reculerent tous deux de quelques pas, et
Carmelita se cacha le visage entre ses mains.
Le colonel, l'ayant regardee durant quelques secondes, se tourna vers
Beio.
--Le colonel Chamberlain vous a entendu, dit-il; vous n'aurez pas besoin
d'aller a lui pour accomplir votre lache menace.
Puis, revenant a Carmelita:
--Vous donnerez a votre oncle, dit-il, les raisons que vous voudrez pour
expliquer que vous refusez d'etre ma femme.
Sans un mot de plus, sans un regard pour Carmelita, il rentra dans le
salon.
Alors, s'adressant au baron.
--Nous reprendrons cet entretien plus tard, dit-il.
Le baron courut a lui, les deux bras tendus; mais deja le colonel avait
ouvert la porte.
XVIII
Carmelita
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