tendu les paroles de
Beio; je crois meme qu'il en aurait entendu bien d'autres, et de tres
instructives, s'il avait ecoute quelques minutes encore; car ce comedien
etait lance. Mais vous connaissez le colonel mieux que moi; vous savez
comme il est delicat, chevaleresque meme. Il n'a pas voulu surprendre
les secrets de M. Beio et de mademoiselle Belmonte, alors meme que ces
secrets le touchaient si profondement; il a brusquement remonte le
store...
--Et qu'a dit mademoiselle Belmonte?
--Ce n'est point elle qui a parle, c'est le colonel; il n'a dit que ces
simples mots, les adressant a mademoiselle Belmonte: "Vous donnerez a
votre oncle les raisons que vous voudrez pour expliquer que vous refusez
d'etre ma femme."
--Et il est sorti simplement, dignement.
--Et qu'a dit mademoiselle Belmonte?
--Mon Dieu! vous savez que mademoiselle Belmonte parle peu, elle agit.
Comme je lui proposais de la reconduire chez elle, elle ne m'a pas
repondu; mais, prenant le bras de son... Beio, elle est sortie avec lui.
--Voila qui est assez crane.
--Crane! je ne comprends pas bien; vous voulez dire, n'est-ce pas, que
cela est scandaleux? C'est aussi mon sentiment.
--Si mademoiselle Belmonte parle peu, son oncle parle, lui, et il agit.
Qu'a-t-il fait? qu'a-t-il dit?
--Ce qu'il a dit lorsque sa niece est rentree, je n'en sais rien, et
j'avoue meme que je le regrette, car cela a du etre original; mais ce
qu'il a fait est beaucoup plus original encore.
--Voyons.
--C'est a trois heures aujourd'hui que cette scene s'est passee entre le
colonel, Beio et mademoiselle Belmonte. Vers six heures, le hasard
m'a conduit aux Champs-Eysees, et qu'est-ce que j'ai vu? Le prince
Mazzazoli, la comtesse Belmonte, Carmelita et leur vieille servante,
montant dans un omnibus du chemin de fer de Lyon, charge de bagages.
--Ils partent?
--Leur position eut ete assez embarrassante a Paris; il eut fallu
repondre a bien des questions; et puis d'un autre cote, le prince eut
ete oblige a regler des affaires penibles avec le colonel, car vous
savez que celui-ci avait envoye la corbeille a sa fiancee: diamants,
bijoux, cadeaux de toutes sortes. Alors le prince a prefere ne pas
restituer lui-meme ces cadeaux; il les renverra d'Italie; c'est plus
simple.
La marquise voulut reiterer ses compliments au baron, mais celui-ci les
refusa obstinement; il n'avait rien fait, a elle toute la gloire du
succes; et il la quitta avec la meme physionomie discr
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