st passe que le colonel vient de rompre avec mademoiselle
Belmonte.
--Rompre! en si peu de temps!
--Quelques paroles ont suffi.
--Le colonel avait donc bien peu d'affection pour Carmelita?
--Je crois, en effet, qu'il ne l'a jamais aimee, et qu'il avait ete
amene malgre lui a ce mariage par les intrigues de Mazzazoli. Voila
pourquoi je desire savoir ce que je dois repondre au colonel, si un jour
ou l'autre il me demande ta main; car j'ai de bonnes raisons pour croire
qu'il m'adressera cette demande.
--Quelles raisons, cher papa?
--Nous parlerons de cela plus tard, le moment n'est pas venu. Sache
seulement que si le colonel n'avait pas pense a toi, il n'aurait pas
rompu avec Carmelita.
--Ah! papa!
--J'ai vecu en ces derniers temps, assez intimement avec le colonel
pour connaitre l'etat de son coeur; ne doute pas de ce que je dis et
reponds-moi franchement.
--La reponse d'aujourd'hui sera celle que je t'ai deja faite deux fois;
je n'ai pas change.
Le baron prit sa fille dans ses bras et l'embrassa tendrement.
Puis, ayant essuye ses yeux mouilles de larmes, il la quitta; car il
n'avait pas le loisir, helas! de se donner tout entier aux douces joies
de la tendresse paternelle.
Il lui fallait voir le colonel.
A ses questions, le concierge repondit que le colonel venait de rentrer.
Alors, sans en demander davantage et sans parler a aucun domestique, le
baron, en habitue, en ami de la maison, se dirigea vers l'appartement
du colonel et, apres avoir frappe deux petits coups, il entra dans la
bibliotheque.
Le colonel etait assis devant son bureau, la tete appuyee dans ses deux
mains.
Ce fut seulement lorsque le baron fut a quelques pas de lui, qu'il
abaissa ses mains et releva la tete.
--J'ai cru, dit le baron, que vous seriez curieux de savoir ce qui s'est
passe apres votre depart.
Le colonel le regarda un moment, comme s'il ne comprenait pas; puis
levant la main:
--Avant tout une question, je vous prie, monsieur.
--Dites, mon ami, dites.
--Vous avez voulu me faire assister a, l'entretien de mademoiselle
Belmonte et de cet homme?
--Je pourrais, dit-il d'une voix que l'emotion rendait tremblante, je
pourrais vous repondre categoriquement; mais j'aime mieux que cette
reponse vous vous la fassiez vous-meme. Vous savez quelle est ma
tendresse pour ma fille, n'est-ce pas? Vous savez dans quels sentiments
d'honnetete et de purete je l'eleve? Pensez-vous que si j'avais su que
mademo
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