vous et Carmelita ayant pousse dans ma tete,
je n'ai pu m'empecher d'en parler a Carmelita en cherchant a decouvrir
son sentiment a ce sujet.
--Et....
--Vous connaissez Carmelita mieux que moi, vous savez comme elle est
reservee, meme mysterieuse: c'est un sphinx. Elle ne m'a pas repondu
franchement que j'avais raison, et je dois meme, pour etre sincere, vous
avouer qu'elle n'est nullement desesperee de ce beau mariage.
--Elle aime la fortune.
--Sans doute. Cependant, apres avoir reconnu le mauvais, je dois
constater aussi le bon; c'est que ce n'est pas seulement la fortune
qu'elle aime; elle n'est pas uniquement une femme d'argent. Il y a en
elle d'autres sentiments, plus nobles, plus desinteresses. Sans doute
cette immense fortune du colonel Chamberlain l'eblouit, et, placee dans
le milieu ou elle est, avec son entourage, son oncle, sa mere, le monde
qui, tous, s'occupent a faire miroiter cette fortune, il n'est pas
etonnant qu'elle subisse cette influence. Mais il n'en est pas moins
vrai qu'au fond, malgre cet eblouissement qui la trouble, elle jette des
regards en arriere. Me croyez-vous sincere?
Assurement Beio ainsi interroge, croyait le baron Lazarus sincere.
--Eh bien, je suis convaincu que si on avait fait une tentative
serieuse, ce mariage aurait ete rompu, et il l'aurait ete par Carmelita.
Quand je dis "on" vous comprenez de qui je parle; c'est de vous,
monsieur Beio. Moi, je l'ai faite, cette tentative, mais d'une facon
indirects, indecise, qui ne pouvait aboutir, puisque je parlais en l'air
sans pouvoir donner une conclusion a mes paroles; et cependant l'effet
que j'ai produit a ete si grand que j'ai eu la conviction que le
succes etait encore possible. Et voila pourquoi j'ai eu avec vous cet
entretien, qui a du vous surprendre mais dont vous voyez maintenant le
but. J'aime le colonel Chamberlain, j'aime tendrement Carmelita; je
crois qu'ils seront malheureux s'ils se marient. D'un autre cote, j'ai
pour vous une haute estime, une vive sympathie, je crois que vous etes
le mari qui peut donner le bonheur a Carmelita, je me mets a votre
disposition pour rompre le premier mariage et conclure le second.
Arrive a cette conclusion, le baron s'arreta de nouveau, et abandonnant
le bras du chanteur, il lui tendit la main.
Beio mit sa main dans celle du baron.
--Monsieur le baron, dit-il, j'aurai l'honneur de vous revoir.
--Est-ce qu'il est fou? se demanda le baron.
Mais non, il n'etait pas fo
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