stesse.
Il fallait que Fausta fut extraordinairement troublee pour s'oublier
au point de laisser lire en partie ses impressions sur son visage, qui
n'exprimait habituellement que les sentiments qu'il lui plaisait de
montrer.
C'est que ce qui lui arrivait la depassait toutes ses previsions.
Sincerement, elle avait cru que la haine, chez elle, avait tue l'amour.
Et voici que, au moment ou elle tenait enfin l'homme qu'elle croyait
hair, elle s'apercevait avec un effarement prodigieux que, ce qu'elle
avait pris pour de la haine, c'etait encore de l'amour. Et, dans son
esprit eperdu, elle ralait:
"Je l'aime toujours! Ce que j'ai cru de la haine n'etait que le depit de
me voir dedaignee... car il ne m'aime pas... il ne m'aimera jamais!...
Et, maintenant que je l'ai livre moi-meme, maintenant que j'ai prepare
pour lui le plus effroyable des supplices, je m'apercois que, s'il
disait un mot, s'il m'adressait un sourire, moins encore: un regard
qui ne soit pas indifferent, je poignarderais de mes mains ce grand
inquisiteur qui me guette, et je mourrais avec lui, si je ne pouvais le
delivrer. Que faire? Que faire?
Et, longtemps, elle resta ainsi, desemparee, reculant, pour la premiere
fois de sa vie, devant la decision a prendre.
Peu a peu, son esprit s'apaisa, ses traits se durcirent. Elle recula de
deux pas, comme pour marquer qu'elle l'abandonnait a son sort, et, d'une
voix extremement douce, comme lointaine et voilee, elle dit seulement:
--Adieu, Pardaillan!
Et ce fut encore un etonnement chez lui, qui s'attendait a d'autres
paroles.
Mais il n'etait pas homme a se laisser demonter pour si peu.
--Non pas adieu, railla-t-il, mais au revoir.
Elle secoua la tete negativement et, avec la meme intonation de douceur
inexprimable, elle repeta:
--Adieu!
--Je vous entends, madame, mais, diantre! on ne me tue pas si aisement.
Vous devez en savoir quelque chose!
Avec obstination, elle fit doucement non, de la tete, et repeta encore:
--Adieu! Tu ne me verras plus.
Une idee affreuse traversa le cerveau de Pardaillan.
"Oh! songea-t-il en frissonnant, elle a dit: "Tu ne me verras plus."
Ne pouvant parvenir a me tuer, l'abominable creature aurait-elle concu
l'infernal projet de me faire aveugler? Par l'enfer qui l'a vomie, ce
serait trop hideux!"
De sa voix toujours dolente et comme lointaine, elle continuait:
--Ou plutot, je m'exprime mal, tu me verras peut-etre, Pardaillan, mais
tu ne me reconnaitr
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