des marchands de billards a choisir.
Tout le monde vous fait de tendres amities. Moi, je vous embrasse de
toute mon ame, ma bonne petite fille. Je vous envoie un bon de cent
francs pour nos emplettes, au cas que vous soyez, comme je suis presque
toujours, sans le sou, a l'heure dite; c'est faire injure peut-etre a
votre esprit d'ordre; mais, quant a moi, j'y suis si habituee, que je
n'en rougis plus.
G.
[1] Le chien de mademoiselle de Rozieres.
CCXIV
A MADAME MARLIANI, A PARIS
Nohant, 26 mai 1842.
Vous etes bien bonne et bien mignonne de m'ecrire souvent. Ne vous
lassez pas, chere amie, quand meme je serais paresseuse, c'est-a-dire
fatiguee; car, apres avoir fait, chaque nuit, six heures de pieds de
mouche, je suis bien aveuglee et bien roidie du bras droit pour ecrire
quelques lignes dans la journee. Pardonnez-moi quand je suis en retard,
et sachez toujours bien que je pense a vous, que je parle de vous, et
que je cause avec vous en reve.
Tout mon monde va bien. J'ai recu votre lettre, jointe et collee par
l'encre a celle de Leroux; c'etait un bon jour pour moi de vous recevoir
tous deux a la fois. J'aurais voulu me mettre sous la meme enveloppe
pour etre plus avec vous. Le _vieux_ doit etre content de moi a l'heure
qu'il est. Il aura recu mon envoi. J'ai recu aussi le meme jour des
nouvelles de Pauline[1], qui devait chanter le _Barbier_ dans quatre ou
cinq jours, ayant reussi a s'organiser tant bien que mal une troupe.
Elle me parait enchantee de l'Espagne, de la bonne reception qu'on lui
a faite, du beau soleil et du mouvement dont elle avait besoin. Elle
partira ensuite pour l'Andalousie et reviendra par Nohant.
Que je suis donc heureuse pour vous de savoir le gros Manoel sur le
point de vous revenir: le retrouverai-je a Paris a la fin d'aout? je
le voudrais bien. S'il retourne en Espagne auparavant, vous devriez
le reconduire jusqu'a Nohant; de la, il reprendrait la malle-poste de
Toulouse ou de Bordeaux a volonte. Promettez-moi d'y songer et d'y
tacher.
Je suis tout emerveillee des gracieusetes du souverain d'Enrico; mais je
defends a ce grand homme rehabilite de se laisser enivrer par la faveur
royale: je le prie de rester a son metier et de ne plus songer a ses
canons. C'etait jadis un homme terrible, vous en avez fait une femme
charmante. Il est beaucoup plus joli et plus heureux ainsi.
Qu'est-ce que vous me dites, que Petetin est fache de n'avo
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