oudrez dans le prix de
quarante francs. Nos paysannes portent ces chales en fichu, en faisant
plusieurs plis retenus par une epingle sur la nuque, et en laissant
descendre la pointe jusqu'au-dessous de la taille, et les cotes
jusqu'au-dessus du coude, tres croises sur la poitrine. C'est donc
plutot un grand fichu qu'un chale, mais avec de la frange tout autour,
quand elles sont en grande tenue. Il faut une bordure dans le dessin, ou
un semis, ou encore un chale uni. Vous comprenez qu'une rayure en biais
n'irait pas avec ce deploiement regulier sur le dos. Vous pouvez le
prendre ou en soie ou en laine, peut-etre en cachemire francais leger.
Quant a la couleur, comme Francoise porte le deuil toute sa vie en
qualite de veuve berrichonne, il faut que ce soit un chale de deuil;
mais le deuil de nos paysannes admet le gros bleu, le gris, le gros
vert, le violet, le brun, le puce et le marron. Toutes les autres
couleurs sont proscrites. Un seul point rouge serait une abomination.
Voila le superbe cadeau que vous demande votre _honore maitre_, avec
un empressement digne de l'ardeur qu'il porte dans ses dons, et de
l'impatience qu'il met dans les petites choses.
Nous autres, Maurice et moi, qui sommes de grands philosophes, nous vous
declarons que, si vous ne nous envoyez pas _excessivement vite_ cinq
billes de billard, nous vous ecrirons un torrent d'injures, et nous
mettrons Carillo[1] a feu et a sang. Nous avons trouve notre billard
desseche, les queues gelees, les billes ecorchees, et tout l'attirail
endommage. Nous avons pris nos precautions pour beaucoup de choses; mais
nous n'avions pas prevu que nos billes seraient marquees de la petite
verole. Il faut que les rats aient fait de beaux carambolages cet hiver.
Ainsi, mademoiselle, faites-nous acheter cinq billes pour la _partie
russe, deux blanches, une rouge, une jaune et une bleue_. Priez M. Gril
de nous faire cette emplette, lui qui est un _fameux_ joueur de billard,
puisqu'il m'a battue plusieurs fois. Dites-lui, pour sa gouverne, que le
billard est grand, non pas enorme, mais assez grand, pour que les billes
ne soient pas de la premiere petitesse, ni de la premiere grosseur. S'il
pouvait, en meme temps, nous acheter d'excellents procedes, il mettrait
le comble a ses bienfaits. Je ne suis pas contente de ceux que j'ai
emportes: ils sont trop durs. Je les ai pris chez Plenel, boulevard
Saint-Martin; _avis_ pour n'y pas retourner. Mais, sur le meme
boulevard, il y a
|