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"Tu es malade, bien malade!" C'est peut-etre a force de m'entendre repeter ce mot, qu'il m'est venu sur les levres, en vous voyant dans vos acces. Je n'y ai pas mis plus d'insolence que ne le faisait mon pauvre Pylade, le plus calme et le plus patient des hommes! Vous me direz que je n'ai pas l'honneur d'etre votre Pylade. Je voudrais pouvoir etre celui de tous les hommes qui souffrent et leur faire le bien que mon ami m'a fait. Vous direz encore que cette amitie universelle est la preuve de mon mauvais coeur. Il se peut, mais je ne le savais pas; qu'elle vous irrite et vous offense, au lieu de vous calmer, je vous en garderai votre part, et, pour vous la prouver, puisque c'est le moyen, je ne vous la temoignerai pas davantage. Sur ce, o commandeur des non-croyants! pardonnez-moi, ne me tuez pas en duel, et remettez dans votre poche un de vos sujets de chagrin les plus mal fondes. Charlotte, qui vous aime, a cru bien faire en vous parlant de moi. Elle s'est trompee, ne l'agitez pas avec cela. Je ne lui en parlerai seulement pas. Elle a eu de bonnes intentions; car, elle, elle a un coeur affectueux, vous ne pouvez pas le nier. Maurice vous remercie de votre bon souvenir. Nous travaillons et cultivons Euripide, Eschyle et Sophocle pour le quart d'heure, dans des traductions sans doute fort plates, mais qui nous laissent encore voir que ces gens-la avaient quelque talent pour leur temps, comme on dirait a la cour. Moi, je m'occupe a avoir mal a la tete et aux yeux. Je ne sais si vous pourrez me lire. J'aurais mieux fait, pour ma sante, d'avoir le coeur de rocher dont vous me gratifiez, de vous laisser grogner tout votre saoul, que de m'endommager le nerf optique a vous repondre si longuement. Pardieu! je suis bien bete, et je devrais avoir les profits de l'egoisme, puisque j'en ai les honneurs. Toute a vous. G.S. CCXVI A M. CHARLES PONCY, A TOULON Nohant, 23 juin 1842. Mon cher Poncy, Je ne vous ecris qu'un mot, en attendant que je puisse vous ecrire davantage. J'ai, depuis six semaines, d'affreuses douleurs dans la tete, produites par l'effet de la lumiere _sur les yeux_. J'ai une peine bien grande a fournir mon travail a la _Revue independante_, et, quatre ou cinq jours par semaine, je suis forcee de m'enfermer dans l'obscurite comme une chauve-souris; je vois alors le soleil et la nature par les yeux de l'esprit et par la memoire; car, pour les yeux du cor
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