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tre volonte. On se reconcilie alors avec soi-meme, on se soumet au jugement des hommes et a la volonte de Dieu; c'est alors qu'on cesse d'etre personnel et que la vie des autres reprend, a nos yeux, sa veritable importance, son effet salutaire et doux. Il est vrai que, pour arriver en vieillissant a cet oubli de l'individualisme excessif, qui est le stimulant et le tourment de la jeunesse, il faut pouvoir se rappeler qu'on a ete tres sincere, et tres ferme dans ses bonnes intentions. Donc, quand je dis que vous serez tranquille sur vos vieux jours, je ne vous fais pas d'insulte et je ne traite pas avec mepris votre mal present. Je ne crois pas a l'heureuse vieillesse des vilaines gens. Je pense, au contraire, que leur ame va toujours s'aigrissant et que leur enfer est en ce monde. Vous me direz que le monde n'est peuple que de ces gens-la. Eh! mon Dieu, je l'ai cru, je l'ai dit de meme, tant qu'il a ete en leur pouvoir de me faire souffrir. Et pourquoi avaient-ils ce pouvoir? c'est que je le leur donnais par la susceptibilite de mon amour-propre. Je ne pensais qu'a me battre avec eux, et guere a les plaindre; la pitie vient quand l'orgueil s'en va, elle change le point de vue, et, si elle rend parfois plus triste encore, c'est une tristesse douce et ou l'esperance vient trouver place. N'allez pas me croire douce, bonne et tendre pour avoir pense et dit cela. C'est encore chez moi a l'etat de decouverte, et, dans la pratique, je ne vaux encore rien; j'attends avec impatience qu'il ne me reste pas un cheveu noir sur la tete. Alors, j'en suis sure, je n'aurai plus un sentiment injuste dans le coeur; je verrai les hommes non mechants, mais ignorants et faibles, en realite, comme je les apercois deja par la theorie. Et vous aussi, vous les verrez tels, et tout ce qui vous parait absurde dans mon optimisme, vous l'aurez trouve vous-meme, et reconnu vrai. Votre jeunesse furibonde et hautaine me rappelle la mienne, et vous ne pouvez inventer aucun blaspheme nouveau pour moi. Si je vous racontais jusqu'ou j'ai pousse la haine de toute chose et l'horreur de la vie, j'aurais l'air de vous faire des romans. J'avais un ami, un vrai Pylade qui m'a surnomme son Oreste, pour m'avoir vue aux prises avec les Eumenides, et pourtant je n'avais tue ni pere ni mere. Il avait bien raison de ne me pas prendre au serieux; car je me revais aussi mechante que les autres hommes, horriblement mechants a mes yeux. Il avait coutume de me dire:
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