froidie, le
lendemain de l'inspiration.
Voyons ce qu'il y aurait dans le tiroir encore: de l'amitie, de la
sympathie? un veritable interet? sans doute, vous savez que le coffre
en est plein, et, si vous etiez comme moi, vous ne devriez pas aimer a
abuser dans les mots des plus saintes choses du monde, en faisant trop
prendre l'air aux reliques de l'ame.
Troisiemes reliques du tiroir: des avis, des avertissements, des sermons
affectueux dans l'occasion? Eh bien! si vous recapitulez, vous verrez
que j'ai deja maintes fois ouvert le tiroir pour vous ecrire quand cela
etait utile. Je vous ai envoye, pour commencer, l'amitie, l'interet,
la sympathie, l'approbation, la louange sincere et meritee; et puis,
ensuite, les sermons affectueux et des avis pleins de sollicitude. Si je
le rouvrais toutes les semaines pour vous approuver, je vous donnerais
de la vanite, et je vous ferais du mal. Si je le rouvrais de meme pour
vous sermonner; je vous causerais du decouragement, et vous ferais
encore du mal. Des lettres de bons procedes, de politesse ou de
convenance, je n'en ai pas besoin, ni vous non plus. Je ne sais donc
pas pourquoi vous m'ecrivez, avec tant de vivacite, des plaintes si
douloureuses sur mon silence et mon oubli. Je vois que vous etes dans
une periode d'expansion excessive. Vous etes tout jeune, vous etes
meridional, vous etes poete, cela s'explique. Eh bien! mon enfant,
faites des vers, de beaux vers. Jetez votre coeur a pleines mains a
votre compagne, a votre mere, a vos amis et a vos camarades. Mais, avec
moi, si vous voulez que votre attachement vous profite, soyez plus
calme, plus serieux et plus patient; car j'ai une nature tres
concentree, tres froide exterieurement, tres reflechie et tres
silencieuse. Si vous ne me comprenez pas, je ne vous serai bonne a rien.
Mon amitie tranquille et rarement expansive vous blessera sans vous
convaincre, et je serais pour votre vie une agitation, au lieu d'etre un
bienfait.
Puisque nous voila sur ce sujet, j'ai deux reproches a vous faire d'une
nature assez delicate, et je veux que vous preniez Desiree pour seule
confidente et pour juge, avec votre mere, si vous voulez, je suis sure
qu'elles ont plus de droiture et de sens qu'aucune dame de nos salons.
Voici mes reproches: lisez les en riant, mais aussi en prenant la
resolution de vous observer. C'est une querelle de pure litterature ture
que je vous fais, une guerre de mots, une chicane sur les expressions.
Vous ne
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