orts pour calmer de tels
ressentimens; la discorde n'en faisait pas moins de funestes progres;
le public, instruit de ce qui se passait, distinguait le directoire en
majorite et minorite, et rangeait Larevelliere, Rewbell et Barras d'une
part, Carnot et Letourneur de l'autre.
On classait aussi les ministres. Comme on s'attachait beaucoup a
critiquer la direction des finances, on poursuivait le ministre Ramel,
administrateur excellent, que la situation penible du tresor obligeait a
des expediens blamables en tout autre temps, mais inevitables dans les
circonstances. Les impots ne rentraient que difficilement, a cause
du desordre effroyable de la perception. Il avait fallu reduire
l'imposition fonciere; et les contributions indirectes rendaient
beaucoup moins qu'on ne l'avait presume. Souvent on se trouvait sans
aucuns fonds a la tresorerie; et, dans ces cas pressans, on prenait sur
les fonds de l'ordinaire ce qui etait destine a l'extraordinaire, ou
bien on anticipait sur les recettes, et on faisait tous les marches
bizarres et onereux auxquels les situations de ce genre donnent lieu. On
criait alors aux abus et aux malversations, tandis qu'il aurait fallu au
contraire venir au secours du gouvernement. Ramel, qui remplissait les
devoirs de son ministere avec autant d'integrite que de lumieres,
etait en butte a toutes les attaques et traite en ennemi par tous les
journaux. Il en etait ainsi du ministre de la marine Truguet, connu
comme franc republicain, comme l'ami de Hoche, et comme l'appui de tous
les officiers patriotes; ainsi du ministre des affaires etrangeres,
Delacroix, capable d'etre un bon administrateur, mais du reste mauvais
diplomate, trop pedant et trop rude dans ses rapports avec les ministres
des puissances; ainsi de Merlin, qui, dans son administration de la
justice, deployait toute la ferveur d'un republicain montagnard. Quant
aux ministres de l'interieur, de la guerre et de la police, Benezech,
Petiet et Cochon, on les rangeait entierement a part. Benezech avait
essuye tant d'attaques de la part des jacobins, pour avoir propose de
revenir au commerce libre des subsistances et de ne plus nourrir
Paris, qu'il en etait devenu agreable au parti contre-revolutionnaire.
Administrateur habile, mais eleve sous l'ancien regime qu'il regrettait,
il meritait en partie la faveur de ceux qui le louaient. Petiet,
ministre de la guerre, s'acquittait bien de ses fonctions; mais creature
de Carnot, il en partageait ent
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