de Modene, des deux legations et de la Romagne; de
reunir le duche de Modene a la Lombardie, et d'en composer une seule
republique, dont la capitale serait Milan, et dont le nom serait
_Cisalpine_, a cause de sa situation par rapport aux Alpes. Il voulait
ensuite donner les deux legations et la Romagne a Venise, en ayant soin
de soumettre son aristocratie et de modifier sa constitution. De cette
maniere, il existerait en Italie deux republiques, alliees de la France,
lui devant leur existence, et disposees a concourir a tous ses plans.
La Cisalpine aurait pour frontiere l'Oglio, qu'il serait facile de
retrancher. Elle n'avait pas Mantoue, qui restait avec le Mantouan a
l'empereur; mais on pouvait faire de Pizzighitone sur l'Adda une place
de premier ordre; on pouvait relever les murs de Bergame et de Creme. La
republique de Venise avec ses iles, avec le Dogado et la Polesine qu'on
tacherait de lui conserver, avec les deux legations et la Romagne, qu'on
lui donnerait, avec la province de Massa-Carrara, et le golfe de la
Spezia, qu'on y ajouterait dans la Mediterranee, serait une puissance
maritime touchant a la fois aux deux mers.
On se demande pourquoi Bonaparte ne profitait pas de sa position pour
rejeter tout-a-fait les Autrichiens hors de l'Italie; pourquoi surtout
il les indemnisait aux depens d'une puissance neutre, et par un attentat
semblable a celui du partage de la Pologne. D'abord, etait-il possible
d'affranchir entierement l'Italie? Ne fallait-il pas bouleverser encore
l'Europe, pour la faire consentir au renversement du pape, du roi de
Piemont, du grand-duc de Toscane, des Bourbons de Naples, et du prince
de Parme? La republique francaise etait-elle capable des efforts qu'une
telle entreprise aurait encore exiges? N'etait-ce pas beaucoup de
jeter dans cette campagne les germes de la liberte, en instituant deux
republiques, d'ou elle ne manquerait pas de s'etendre bientot jusqu'au
fond de la peninsule? Le partage des etats venitiens n'avait rien qui
ressemblat a l'attentat celebre qu'on a si souvent reproche a l'Europe.
La Pologne fut partagee par les puissances memes qui l'avaient soulevee,
et qui lui avaient promis solennellement leurs secours. Venise, a qui
les Francais avaient sincerement offert leur amitie, l'avait refusee, et
se preparait a les trahir, et a les surprendre dans un moment de peril.
Si elle avait a se plaindre de quelqu'un, c'etait des Autrichiens, au
profit de qui elle voulait trahir les
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