est-a-dire, qu'a
defaut d'argent pour payer les troupes, ou les fournisseurs qui les
nourrissaient, on prenait sur les sommes destinees aux appointemens
des fonctionnaires publics, juges, administrateurs de toute espece.
Non-seulement on confondait ces deux sortes de fonds, mais on anticipait
sur les rentrees, et on delivrait des assignations sur tel ou tel
receveur, acquittables avec les premiers fonds qui devaient lui arriver.
On donnait aux fournisseurs des ordonnances sur la tresorerie, dont le
ministre reglait l'ordre d'acquittement, suivant l'urgence des besoins;
ce qui donnait quelquefois lieu a des abus, mais ce qui procurait le
moyen de pourvoir au plus presse, et d'empecher souvent tel entrepreneur
de se decourager et d'abandonner son service. Enfin, a defaut de toute
autre ressource, on delivrait des bons sur les biens nationaux, papier
qu'on negociait aux acheteurs. C'etait la le moyen employe, depuis la
destruction du papier-monnaie, pour anticiper sur les ventes. De cet
etat des finances, il resultait que les fournisseurs de la plus mauvaise
espece, c'est-a-dire les fournisseurs aventureux, entouraient seuls le
gouvernement, et lui faisaient subir les marches les plus onereux. Ils
n'acceptaient qu'a un taux fort bas les papiers qu'on leur donnait, et
ils elevaient le prix des denrees a proportion des chances ou des delais
du paiement. On etait souvent oblige de faire les arrangemens les plus
singuliers pour suffire a certains besoins. Ainsi le ministre de la
marine avait achete des farines pour les escadres, a condition que le
fournisseur, en livrant les farines a Brest, en donnerait une partie
en argent, pour payer la solde aux marins prets a se revolter. Le
dedommagement de cette avance de numeraire se trouvait naturellement
dans le haut prix des farines. Toutes ces pertes etaient inevitables
et resultaient de la situation. Les imputer au gouvernement etait
une injustice. Malheureusement la conduite scandaleuse de l'un des
directeurs, qui avait une part secrete dans les profits extraordinaires
des fournisseurs, et qui ne cachait ni ses prodigalites, ni les progres
de sa fortune, fournissait un pretexte a toutes les calomnies. Ce
n'etaient pas certainement les benefices honteux d'un individu qui
mettaient l'etat dans la detresse, mais on en prenait occasion pour
accuser le directoire de ruiner les finances.
Il y avait la, pour une opposition violente et de mauvaise foi, une
ample matiere a declamations e
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