s coups de sabre avec leurs
camarades du Rhin. La division Augereau surtout, qui se distinguait
comme son general par son exaltation revolutionnaire, etait la plus
agitee; il fallut une proclamation energique de son chef pour la
contenir, et pour faire treve aux duels. La qualification de _citoyen_
fut seule autorisee.
Le general Bonaparte voyait avec plaisir l'esprit de l'armee, et en
favorisait l'essor. Ses premiers succes avaient tous ete remportes
contre la faction royaliste, soit devant Toulon, soit au 13 vendemiaire.
Il etait donc brouille d'origine avec elle. Depuis, elle s'etait
attachee a rabaisser ses triomphes parce que l'eclat en rejaillissait
sur la revolution. Ses dernieres attaques surtout remplirent le general
de colere. Il ne se contenait plus en lisant la motion du Dumolard, et
en apprenant que la tresorerie avait arrete le million envoye a Toulon.
Mais outre ces raisons particulieres de detester la faction royaliste,
il en avait encore une plus generale et plus profonde; elle etait dans
sa gloire et dans la grandeur de son role. Que pouvait faire un roi
pour sa destinee? Si haut qu'il put l'elever, ce roi eut ete toujours
au-dessus de lui. Sous la republique, au contraire, aucune tete ne
dominait la sienne. Qu'il ne revat pas encore sa destinee inouie, du
moins il prevoyait dans la republique une audace et une immensite
d'entreprises, qui convenaient a l'audace et a l'immensite de son genie;
tandis qu'avec un roi la France eut ete ramenee a une existence obscure
et bornee. Quoi qu'il fit donc de cette republique, qu'il la servit ou
l'opprimat, Bonaparte ne pouvait etre grand qu'avec elle, et par elle,
et devait la cherir comme son propre avenir. Qu'un Pichegru se laissat
allecher par un chateau, un titre et quelques millions, on le concoit;
a l'ardente imagination du conquerant de l'Italie, il fallait une autre
perspective; il fallait celle d'un monde nouveau, revolutionne par ses
mains.
Il ecrivit donc au directoire qu'il etait pret, lui et l'armee, a voler
a son secours, pour faire rentrer les contre-revolutionnaires dans le
neant. Il ne craignit pas de donner des conseils, et engagea hautement
le directoire a sacrifier quelques traitres et a briser quelques
presses.
Dans l'armee du Rhin, les dispositions etaient plus calmes. Il y avait
quelques mauvais officiers places dans les rangs par Pichegru. Cependant
la masse de l'armee etait republicaine, mais tranquille, disciplinee,
pauvre, et moin
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