avait
encore sous la main aucun moyen reel; sa seule ressource etait dans les
passions des partis, et il fallait courir la ou elles eclataient, soit
pour observer, soit pour agir. Il y avait dans cette reunion Portalis,
Troncon-Ducoudray, Lacuee, Dumas, Simeon, Doulcet-Pontecoulant,
Thibaudeau, Villaret-Joyeuse, Willot et Pichegru. On s'anima beaucoup,
comme il etait naturel; on parla des projets du directoire; on cita des
propos de Rewbell, de Larevelliere, de Barras, qui annoncaient un parti
pris, et on conclut du changement de ministere et de la marche des
troupes, que ce parti etait un coup d'etat contre le corps legislatif.
On proposa les resolutions les plus violentes, comme de suspendre le
directoire et de le mettre en accusation, ou meme de le mettre hors la
loi. Mais pour executer toutes ces resolutions, il fallait une force, et
Thibaudeau, ne partageant pas l'entrainement general, demandait ou on la
prendrait. On repondait a cela qu'on avait les douze cents grenadiers du
corps legislatif, une partie du 21e regiment de dragons, commande par
Malo, et la garde nationale de Paris; qu'en attendant la reorganisation
de cette garde, on pourrait envoyer dans chaque arrondissement de la
capitale des pelotons de grenadier, pour rallier autour d'eux les
citoyens qui s'etaient armes en vendemiaire. On parla beaucoup sans
parvenir a s'entendre, comme il arrive toujours quand les moyens ne sont
pas reels. Pichegru, froid et concentre comme a son ordinaire, fit sur
l'insuffisance et le danger des moyens proposes, quelques observations,
dont le calme contrastait avec l'emportement general. On se separa, on
retourna chez Carnot, chez les ministres disgracies. Carnot desapprouva
tous les projets proposes contre le directoire. On se reunit une seconde
fois chez Troncon-Ducoudray; mais Pichegru et Willot n'y etaient plus.
On divagua encore, et, n'osant recourir aux moyens violens, on finit par
se retrancher dans les moyens constitutionnels. On se promit de demander
la loi sur la responsabilite des ministres, et la prompte organisation
de la garde nationale.
A Clichy, on declamait comme ailleurs, et on ne faisait pas mieux, car
si les passions etaient plus violentes, les moyens n'etaient pas plus
grands. On regrettait surtout la police, qui venait d'etre enlevee a
Cochon, et on revenait a l'un des projets favoris de la faction, celui
d'oter la police de Paris au directoire, et de la donner au corps
legislatif, en forcant le sens
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