ns. De cette maniere, la guerre, les services
generaux et la dette ne portaient la depense qu'a 616 millions, montant
de la recette. Mais pour se renfermer dans ces bornes, il fallait
prendre un parti decisif a l'egard de la dette. Depuis l'abolition
du papier-monnaie et le retour du numeraire, le service des interets
n'avait pu se faire exactement. On avait paye un quart en numeraire, et
trois quarts en bons sur les biens nationaux, appeles _bons des trois
quarts_. C'etait, en quelque sorte, comme si on eut paye un quart en
argent et trois quarts en assignats. La dette n'avait donc guere ete
servie jusqu'ici qu'avec les ressources provenant des biens nationaux,
et il devenait urgent de prendre un parti a cet egard, dans l'interet de
l'etat et des creanciers. Une dette dont la charge annuelle montait
a 258 millions, etait veritablement enorme pour cette epoque. On ne
connaissait point encore les ressources du credit et la puissance de
l'amortissement. Les revenus etaient bien moins considerables qu'ils ne
le sont devenus, car on n'avait pas eu le temps de recueillir encore les
bienfaits de la revolution; et la France, qui a pu produire depuis un
milliard de contributions generales, pouvait a peine alors donner 616
millions. Ainsi la dette etait accablante, et l'etat se trouvait dans la
situation d'un particulier en faillite. On resolut donc de continuer a
servir une partie de la dette en numeraire, et, au lieu de servir le
reste en bons sur les biens nationaux, d'en rembourser le capital meme
avec ces biens. On voulait en conserver un tiers seulement: le tiers
conserve devait s'appeler _tiers consolide_, et demeurer sur le
grand-livre avec qualite de rente perpetuelle. Les deux autres tiers
devaient etre rembourses au capital de vingt fois la rente, et en bons
recevables en paiement des biens nationaux. Il est vrai que ces bons
tombaient dans le commerce a moins du sixieme de leur valeur; et que,
pour ceux qui ne voulaient pas acheter des terres, c'etait une veritable
banqueroute.
Malgre le calme et la docilite des conseils depuis le 18 fructidor,
cette mesure excita une vive opposition. Les adversaires du
remboursement soutenaient que c'etait une vraie banqueroute; que la
dette, a l'origine de la revolution, avait ete mise sous la sauvegarde
de l'honneur national, et que c'etait deshonorer la republique, que de
rembourser les deux tiers; que les creanciers qui n'acheteraient pas
des biens perdraient les neuf dixiemes
|