a reunir la milice de
vendemiaire, sous pretexte d'organiser la garde nationale. Ceux
qui etaient sincerement republicains aimaient mieux la victoire du
directoire, mais ils auraient tous prefere qu'il n'y eut pas de combat;
et ils pouvaient s'apercevoir maintenant combien leur opposition, en
effrayant le directoire, et en encourageant les reacteurs, avait ete
funeste. Ils ne s'avouaient pas leurs torts, mais ils deploraient la
situation, en l'imputant comme d'usage a leurs adversaires. Ceux des
clichyens qui n'etaient pas dans le secret de la contre-revolution, qui
ne la souhaitaient meme pas, qui n'etaient mus que par une imprudente
haine contre les exces de la revolution, commencaient a etre effrayes,
et craignaient, par leur contradiction, d'avoir reveille tous les
penchans revolutionnaires du directoire. Leur ardeur etait ralentie.
Les clichyens tout a fait royalistes etaient fort presses d'agir, et
craignaient d'etre prevenus. Ils entouraient Pichegru, et le poussaient
vivement. Celui-ci, avec son flegme accoutume, promettait aux agens du
pretendant, et temporisait toujours. Il n'avait du reste encore aucun
moyen reel; car quelques emigres, quelques chouans dans Paris, ne
constituaient pas une force suffisante; et jusqu'a ce qu'il eut dans sa
main la garde nationale, il ne pouvait faire aucune tentative serieuse.
Froid et prudent, il voyait cette situation avec assez de justesse, et
repondait a toutes les instances qu'il fallait attendre. On lui disait
que le directoire allait frapper, il repondait que le directoire ne
l'oserait pas. Du reste, ne croyant pas a l'audace du directoire,
trouvant ses moyens encore insuffisans, jouissant d'un grand role, et
disposant de beaucoup d'argent, il etait naturel qu'il ne fut pas presse
d'agir.
Dans cette situation, les esprits sages desiraient sincerement qu'on
evitat une lutte. Ils auraient souhaite un rapprochement, qui, en
ramenant les constitutionnels et les clichyens moderes au directoire,
lui put rendre une majorite qu'il avait perdue, et le dispenser de
recourir a de violens moyens de salut. Madame de Stael etait en position
de desirer et d'essayer un pareil rapprochement. Elle etait le centre
de cette societe eclairee et brillante, qui, tout en trouvant le
gouvernement et ses chefs un peu vulgaires, aimait la republique et y
tenait. Madame de Stael aimait cette forme de gouvernement, comme la
plus belle lice pour l'esprit humain; elle avait deja place dans un
poste
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