ec lui,
voulut l'interpeller une derniere fois, pour le ramener, s'il etait
possible, a ses collegues; lui parlant avec assurance et douceur, il
lui adressa quelques questions: "Carnot, lui dit-il, nous as-tu jamais
entendus faire une proposition qui tendit a diminuer les attributions
des conseils, a augmenter les notres, a compromettre la constitution de
la republique?--Non, repondit Carnot avec embarras.--Nous as-tu, reprit
Larevelliere, jamais entendus, en matiere de finances, de guerre, de
diplomatie, proposer une mesure qui ne fut conforme a l'interet public?
Quant a ce qui t'est personnel, nous as-tu jamais entendus, ou diminuer
ton merite, ou nier tes services? Depuis que tu t'es separe de nous,
as-tu pu nous accuser de manquer d'egards pour ta personne? Ton avis
en a-t-il ete moins ecoute, quand il nous a paru utile et sincerement
propose? Pour moi, ajouta Larevelliere, quoique tu aies appartenu a une
faction qui m'a persecute, moi et ma famille, t'ai-je jamais montre la
moindre haine?--Non, non, repondit Carnot a toutes ces questions.--Eh
bien! ajouta Larevelliere, comment peux-tu te detacher de nous, pour
te rattacher a une faction qui t'abuse, qui veut se servir de toi pour
perdre la republique, qui veut te perdre apres s'etre servi de toi, et
qui te deshonorera en te perdant?" Larevelliere employa les expressions
les plus amicales et les plus pressantes, pour demontrer a Carnot
l'erreur et le danger de sa conduite. Rewbell et Barras meme firent
violence a leur haine. Rewbell par devoir, Barras par facilite, lui
parlerent presque en amis. Mais les demonstrations amicales ne font
qu'irriter certains orgueils: Carnot resta froid, et, apres tous les
discours de ses collegues, renouvela sechement sa proposition de mettre
en deliberation l'organisation de la garde nationale. Les directeurs
leverent alors la seance, et se retirerent convaincus, comme on l'est
si facilement dans ces occasions, que leur collegue les trahissait, et
etait d'accord avec les ennemis du gouvernement.
Il fut arrete que le coup d'etat porterait sur lui et sur Barthelemy,
comme sur les principaux membres des conseils. Voici le plan auquel on
s'arreta definitivement. Les trois directeurs croyaient toujours que les
deputes de Clichy avaient le secret de la conspiration. Ils n'avaient
acquis ni contre eux, ni contre Pichegru, aucune preuve nouvelle qui
permit les voies judiciaires. Il fallait donc employer la voie d'un
coup d'etat. Ils avaient
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