laisser le corps legislatif sur cette foule d'evenemens
extraordinaires." Apres s'etre occupe des evenemens de Venise, Dumolard
parle ensuite de ceux de Genes, qui presentaient, disait-il, le meme
caractere, et faisaient supposer l'intervention de l'armee francaise
et de ses chefs. Il parla aussi de la Suisse, avec laquelle on etait,
disait-il, en contestation pour un droit de navigation, et il demanda
si on voulait democratiser tous les etats allies de la France. Louant
souvent les heros d'Italie, il ne parla pas une seule fois du general en
chef, qu'alors aucune bouche ne negligeait l'occasion de prononcer en
l'accompagnant d'eloges extraordinaires. Dumolard finit par proposer
un message au directoire, pour lui demander des explications sur les
evenemens de Venise et de Genes, et sur les rapports de la France avec
la Suisse.
Cette motion causa un etonnement general, et prouva l'audace des
clichyens. Elle devait bientot leur couter cher. En attendant qu'ils
en essuyassent les tristes consequences, ils se montraient pleins
d'arrogance, affichaient hautement les plus grandes esperances, et
semblaient devoir etre sous peu les maitres du gouvernement. C'etait
partout la meme confiance et la meme imprudence qu'en vendemiaire. Les
emigres rentraient en foule. On envoyait de Paris une quantite de faux
passe-ports et de faux certificats de residence dans toutes les
parties de l'Europe. On en faisait commerce a Hambourg. Les emigres
s'introduisaient sur le territoire par la Hollande, par l'Alsace, la
Suisse et le Piemont. Ramenes par le gout qu'ont les Francais pour
leur belle patrie, et par les souffrances et les degouts essuyes a
l'etranger, n'ayant d'ailleurs plus rien a esperer de la guerre, depuis
les negociations entamees avec l'Autriche, ayant meme a craindre le
licenciement du corps de Conde, ils venaient essayer, par la paix et par
les intrigues de l'interieur, la contre-revolution qu'ils n'avaient pu
operer par le concours des puissances europeennes. Du reste, a defaut
d'une contre-revolution, ils voulaient revoir au moins leur patrie, et
recouvrer une partie de leurs biens. Grace en effet a l'interet qu'ils
rencontraient partout, ils avaient mille facilites pour les racheter.
L'agiotage sur les differens papiers admis en paiement des biens
nationaux, et la facilite de se procurer ces papiers a vil prix,
la faveur des administrations locales pour les anciennes familles
proscrites, la complaisance des encherisseurs, q
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