avril). Ils s'etaient munis
d'une lettre d'un frere du general, pour etre plus gracieusement
accueillis. Ils aborderent en tremblant cet homme _vraiment
extraordinaire_, dirent-ils, _par la vivacite de son imagination, la
promptitude de son esprit, et la force invincible de ses sentimens_[5].
Il les accueillit avec politesse, et, contenant son courroux, leur
permit de s'expliquer longuement; puis, rompant le silence: "Mes
prisonniers, leur dit-il, sont-ils delivres? Les assassins sont-ils
poursuivis? Les paysans sont-ils desarmes? Je ne veux plus de vaines
paroles: mes soldats ont ete massacres, il faut une vengeance
eclatante!" Les deux envoyes voulurent revenir sur les circonstances
qui les avaient obliges de se premunir contre l'insurrection, sur les
desordres inseparables de pareils evenemens, sur la difficulte de saisir
les vrais assassins. "Un gouvernement, reprit vivement Bonaparte, aussi
bien servi par ses espions que le votre, devrait connaitre les vrais
instigateurs de ces assassinats. Au reste, je sais bien qu'il est aussi
meprise que meprisable, qu'il ne peut plus desarmer ceux qu'il a armes;
mais je les desarmerai pour lui. J'ai fait la paix, j'ai quatre-vingt
mille hommes; j'irai briser vos plombs, je serai un second Attila pour
Venise. Je ne veux plus ni inquisition, ni Livre d'or; ce sont des
institutions des siecles de barbarie. Votre gouvernement est trop vieux,
il faut qu'il s'ecroule. Quand j'etais a Gorice, j'offris a M.
Pezaro mon alliance et des conseils raisonnables. Il me refusa. Vous
m'attendiez a mon retour pour me couper la retraite; eh bien! me voici.
Je ne veux plus traiter, je veux faire la loi. Si vous n'avez pas autre
chose a me dire, je vous declare que vous pouvez vous retirer."
[Note 5: Veramente originale, ma forse non piu che per vivacita
d'imaginazione, robustezza invincibile di sentimento, ed agilita nel
Ravvisarlo esternamento.]
Ces paroles, prononcees avec courroux, atterrerent les envoyes
venitiens. Ils solliciterent une seconde entrevue, mais ils ne purent
pas obtenir d'autres paroles du general, qui persista toujours dans les
memes intentions, et dont la volonte evidente etait de faire la loi a
Venise, et de detruire par la force une aristocratie qu'il n'avait pu
engager a s'amender par ses conseils. Mais bientot ils eurent de bien
autres sujets de crainte, en apprenant avec detail les massacres de
Verone, et surtout l'odieuse cruaute commise au port du Lido. N'osant se
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