e de Venise, et
la bourgeoisie semblait elle-meme exciter ces rixes, qui amenaient la
division dans les forces du parti aristocratique. Le 20 floreal (9 mai),
la terreur fut portee a son comble. Deux membres tres influens du parti
revolutionnaire, les nommes Spada et Zorzi, entrerent en communication
avec quelques-uns des personnages qui composaient la reunion
extraordinaire formee chez le doge. Ils insinuerent qu'il fallait
s'adresser au charge d'affaires de France, et s'entendre avec lui pour
preserver Venise des malheurs qui la menacaient. Donat et Battaglia,
deux patriciens qu'on a deja vus figurer, s'adresserent a Villetard le
9 mai. Ils lui demanderent quels seraient, dans le peril actuel, les
moyens les plus propres a sauver Venise. Celui-ci repondit qu'il n'etait
nullement autorise a traiter par le general en chef, mais que si on lui
demandait son avis personnel, il conseillait les mesures suivantes:
l'embarquement et le renvoi des Esclavons; l'institution d'une garde
bourgeoise; l'introduction de quatre mille Francais dans Venise, et
l'occupation par eux de tous les points fortifies; l'abolition de
l'ancien gouvernement; son remplacement par une municipalite de
trente-six membres choisis dans toutes les classes et ayant le doge
actuel pour maire; l'elargissement de tous les prisonniers pour cause
d'opinion. Villetard ajouta que sans doute a ce prix le general
Bonaparte accorderait la grace des trois inquisiteurs d'etat et du
commandant du Lido.
Ces propositions furent portees au conseil reuni chez le doge. Elles
etaient bien graves, puisqu'elles entrainaient une entiere revolution
dans Venise. Mais les chefs du gouvernement craignaient une revolution
ensanglantee par les projets du parti reformateur, par les fureurs
populaires et par la cupidite des Esclavons. Deux d'entre eux firent une
vive resistance. Pezaro dit qu'ils devaient se retirer en Suisse avant
de consommer eux-memes la ruine de l'antique gouvernement venitien.
Cependant les resistances furent ecartees, et il fut resolu que ces
propositions seraient presentees au grand conseil. La convocation fut
fixee au 23 floreal (12 mai). En attendant, on paya aux Esclavons la
solde arrieree, et on les embarqua pour les renvoyer en Dalmatie. Mais
le vent contraire les retint dans le port, et leur presence dans les
eaux de Venise ne fit qu'entretenir le trouble et la terreur.
Le 23 floreal (12 mai), le grand conseil fut reuni avec appareil pour
voter l'aboli
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