decida le cabinet a entamer une negociation sincere, qui procurat
deux ou trois ans de relache aux ressorts trop tendus de la puissance
anglaise. Il ne pouvait plus etre question de disputer les Pays-Bas,
aujourd'hui cedes par l'Autriche; il ne s'agissait plus que de disputer
sur les colonies, et des lors il y avait moyen et espoir de s'entendre.
Non-seulement la situation indiquait l'intention de traiter, mais le
choix du negociateur la prouvait aussi. Lord Malmesbury etait encore
designe cette fois, et, a son age, on ne l'aurait pas employe deux fois
de suite dans une vaine representation. Lord Malmesbury, celebre par sa
longue carriere diplomatique, et par sa dexterite comme negociateur,
etait fatigue des affaires, et voulait s'en retirer, mais apres une
negociation heureuse et brillante. Aucune ne pouvait etre plus belle
que la pacification avec la France apres cette horrible lutte; et, s'il
n'avait eu la certitude que son cabinet voulait la paix, il n'aurait
pas consenti a jouer un role de parade, qui devenait ridicule en se
repetant. Il avait recu, en effet, des instructions secretes qui ne lui
laissaient aucun doute. Le cabinet anglais fit demander des passe-ports
pour son negociateur; et, d'un commun accord, le lieu des conferences
fut fixe non a Paris, mais a Lille. Le directoire aimait mieux recevoir
le ministre anglais dans une ville de province, parce qu'il craignait
moins ses intrigues. Le ministre anglais, de son cote, desirait n'etre
pas en presence d'un gouvernement dont les formes avaient quelque
rudesse, et preferait traiter par l'intermediaire de ses negociateurs.
Lille fut donc le lieu choisi, et de part et d'autre on prepara une
legation solennelle. Hoche n'en dut pas moins continuer ses preparatifs
avec vigueur, pour donner plus d'autorite aux negociateurs francais.
Ainsi la France, victorieuse de toutes parts, etait en negociation avec
les deux grandes puissances europeennes, et touchait a la paix generale.
Des evenemens aussi heureux et aussi brillans auraient du ne laisser
place qu'a la joie dans tous les coeurs; mais les elections de l'an
V venaient de donner a l'opposition des forces dangereuses. On a vu
combien les adversaires du directoire s'agitaient a l'approche des
elections. La faction royaliste avait beaucoup influe sur leur resultat.
Elle avait perdu trois de ses agens principaux, par l'arrestation de
Brottier, Laville-Heurnois et Duverne de Presle; mais c'etait un petit
dommage, car
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