Russie n'intervenant pas encore dans la lutte, et la Prusse
persistant dans la neutralite, l'Angleterre et l'Autriche restaient
seules en ligne. L'Angleterre etait dans une situation fort triste; elle
ne redoutait plus, pour le moment du moins, une expedition en Irlande,
mais sa banque etait menacee, plus serieusement que jamais; elle ne
comptait pas du tout sur l'Autriche, qu'elle voyait hors d'haleine, et
elle s'attendait a voir la France, apres avoir vaincu le continent,
l'accabler elle-meme de ses forces reunies. L'Autriche, malgre
l'occupation de Kehl et d'Huningue, sentait qu'elle s'etait perdue en
s'opiniatrant contre deux tetes de pont, et en ne portant pas toutes ses
forces en Italie. Les desastres de Rivoli et de la Favorite, la prise
de Mantoue, la mettaient dans un peril imminent. Elle etait obligee de
degarnir le Rhin, et de se reduire, sur cette frontiere, a une veritable
inferiorite, pour porter ses forces et son prince Charles du cote de
l'Italie. Mais pendant l'intervalle que ses troupes mettraient a faire
le trajet du Haut-Rhin a la Piave et a l'Izonzo, elle etait exposee sans
defense aux coups d'un adversaire qui savait saisir admirablement les
avantages du temps.
Toutes ces craintes etaient fondees; la France lui preparait, en effet,
des coups terribles que la campagne que nous allons voir s'ouvrir ne
tarda pas a realiser.
CHAPITRE VIII.
ETAT DE NOS ARMEES A L'OUVERTURE DE LA CAMPAGNE DE 1797--MARCHE DE
BONAPARTE CONTRE LES ETATS ROMAINS.--TRAITE DE TOLENTINO AVEC
LE PAPE.--NOUVELLE CAMPAGNE CONTRE LES AUTRICHIENS.--PASSAGE DU
TAGLIAMENTO. COMBAT DE TARWIS.--REVOLUTION DANS LES VILLES DE BERGAME,
BRESCIA ET AUTRES VILLES DES ETATS DE VENISE.--PASSAGE DES ALPES
JULIENNES PAR BONAPARTE. MARCHE SUR VIENNE. PRELIMINAIRES DE PAIX
AVEC L'AUTRICHE SIGNES A LEOBEN.--PASSAGE DU RHIN A NEUWIED ET A
DIRSHEIM.--PERFIDIE DES VENITIENS, MASSACRE DE VERONE. CHUTE DE LA
REPUBLIQUE DE VENISE.
L'armee de Sambre-et-Meuse, renforcee d'une grande partie de l'armee de
l'Ocean, avait ete portee a quatre-vingt mille hommes. Hoche, qui en
etait devenu general, s'etait arrete peu de temps a Paris, a son
retour de l'expedition d'Irlande, et s'etait hate de se rendre a son
quartier-general. Il avait employe l'hiver a organiser ses troupes et a
les pourvoir de ce qui leur etait necessaire. Tirant de la Hollande et
des provinces d'entre Meuse et Rhin, qu'on traitait en pays conquis, des
ressources assez grandes, il
|