er.
Les depeches de celui-ci, adressees a M. de Vergennes et conservees
au depot des Affaires etrangeres, sont au nombre de soixante; plus de
depeches en tout que d'idylles. On s'apercoit aisement, en y jetant les
yeux, que le poete diplomate redouble d'efforts, et que, novice en cela
peut-etre, il s'applique a justifier par son zele la distinction dont
il est honore. Les affaires de la France avec le Prince et les Etats
de Liege etaient necessairement tres-petites; affaires surtout de
libellistes a poursuivre et de deserteurs a reclamer. Pourtant, par
Liege, on avait les communications libres tant avec la Basse-Allemagne,
dont cet Etat faisait partie, qu'avec la Hollande, dont les Pays-Bas
autrichiens nous tenaient separes. L'interet des Pays-Bas etait
de mettre un mur entre la France et Liege pour fermer cette voie
d'ecoulement a notre commerce. La France, au contraire, cherchait a
faciliter le passage. Aussi presque toutes les depeches de Leonard
roulent sur l'execution de certaines routes et chaussees, de certains
canaux qui avaient ete stipules par un traite recent. Il faut voir comme
le tendre auteur des _Deux Ruisseaux_ s'y evertue. Le Prince-Eveque a
l'air d'etre bien dispose pour la France; mais il ne fait pas de ses
Etats ce qu'il veut. Ceux-ci tachent de tirer de Versailles un secours
d'argent pour les routes demandees. Le chancelier ou chef du ministere
du prince est au fond moins favorable que son maitre. Il s'agit de
penetrer ses vues, de s'assurer que le secours, si on le donne, sera
bien affecte a l'emploi promis. Il y a la un autre _M. de Leonard_ qui
n'est pas le notre, mais une espece d'ingenieur du Prince, et qu'il
s'agit de capter en tout honneur: une boite d'or avec portrait de Sa
Majeste parait produire un effet merveilleux.
A travers cela, et dans les intervalles apres tout assez monotones,
l'occupation favorite de Leonard etait la composition d'un roman
sentimental intitule _Lettres de deux Amants de Lyon_ (Therese et
Faldoni), qu'il ne publia qu'a son retour, en France et qui eut dans
le temps un succes de larmes. Sous une forme detournee, il y caressait
encore le souvenir de ses propres douleurs. L'epigraphe qu'il emprunte a
Valere-Maxime declare tout d'abord sa pensee: "Du moment qu'on s'aime
de l'amour a la fois le plus passionne et le plus pur, mieux vaut mille
fois se voir unis dans la mort que separes dans la vie."
Je crois pouvoir rapporter aussi a ce sejour de Liege la jolie piece
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