ecrivait-il en faisant allusion au
mariage du Dauphin (Louis XVI) et de Marie-Antoinette, il faut avoir peu
de connaissance de l'histoire pour croire qu'on puisse en politique se
reposer sur les assurances amicales qu'on se prodigue, ou au moment de
la formation d'une alliance, ou a celui d'une union faite ou resserree
par des mariages. La prudence exige de n'y compter qu'autant que les
interets communs s'y trouvent, et l'experience de tous les siecles
apprend que ces liaisons de parente sont souvent plus embarrassantes
qu'utiles quand les interets sont naturellement opposes."--Un des soins
de M. de Segur dans ses notes est de rejoindre, autant que possible,
la morale et la politique, et de ne plus les vouloir separer. Voeu
honorable, mais qui est plus de mise dans les livres que dans la
pratique, meme depuis qu'on croit l'avoir renouvelee! De telles maximes,
d'ailleurs, qui n'ont pas pour principe unique l'agrandissement, avaient
peu le temps de prendre racine au lendemain du grand Frederic et au
debut de Napoleon.
Une autre publication de M. de Segur, qui date de la meme annee (1801),
est sa _Decade historique_, ou son tableau des dix annees que comprend
le regne du roi de Prusse Frederic-Guillaume II (1786-1797). Sous ce
titre un peu indecis, l'auteur n'avait sans doute cherche qu'un cadre
pour retracer l'histoire des preliminaires de notre Revolution, ses
diverses phases au dedans et ses contre-coups au dehors jusqu'a l'epoque
de la paix de Bale. On peut soupconner toutefois qu'en y rattachant si
expressement en tete le nom assez disparate du roi de Prusse, en serrant
de pres avec une exactitude severe le regne de ce champion si empresse
de la coalition, qui fut le premier a rengainer l'epee et a deserter
dans l'action ses allies compromis, M. de Segur prenait a sa maniere, et
comme il lui convenait, sa revanche de la non-reussite de Berlin. Si ce
roi eut avec lui des torts de procede, comme on l'a dit et comme vient
de le repeter un ecrit recent[177], il les paya dans ce tableau fidele;
une plume veridique est une arme aussi. M. de Segur ne l'a jamais eue si
ferme, si franchement historique. Ici d'ailleurs comme toujours (est-il
besoin de le dire?), et soit qu'il jugeat les affaires du dehors, soit
qu'il deroulat les crises revolutionnaires du dedans, il usait d'une
equitable mesure. Marie-Joseph Chenier, en parlant de cet ecrit en son
_Tableau de la Litterature_, lui a rendu une justice a laquelle ses
reserves m
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