--Tu en es sure?
--Je te le promets.
--Tu me rends la vie. Mais comment as-tu su?
--Il m'a ecrit: le concierge m'a remis, comme je passais, sa lettre qui
venait d'arriver.
--Que dit-il?
Madame Cormier prit la lettre que Philis lui tendait, mais le papier
tremblait tellement dans sa main agitee qu'elle ne put pas lire.
--Lis-la-moi.
Philis la reprit et lut:
Chere petite soeur,
Apres m'avoir entendu, le juge d'instruction me
garde. Adoucis pour maman la douleur de ce coup;
fais-lui comprendre qu'on ne peut pas ne pas
reconnaitre bientot la faussete de cette accusation
et, de ton cote, emploie-toi a rendre evidente cette
faussete, tandis que, du mien, je vais travailler a
prouver mon innocence.
Embrasse bien la pauvre maman pour moi, et
trouve dans ta tendresse, dans ta force et ta bonte
des consolations pour elle; la mienne sera de penser
que tu es pres d'elle, chere petite soeur bien-aimee.
FLORENTIN.
--Et c'est ce brave garcon qu'on accuse d'un assassinat! s'ecria madame
Cormier en fondant en larmes.
Il fallut plusieurs minutes a Philis pour calmer un peu cette crise.
--C'est a lui qu'il faut penser, maman; ne nous abandonnons pas.
--Tu vas faire quelque chose, n'est-ce pas, ma petite Philis?
--Je vais aller trouver M. Saniel.
--M. Saniel est medecin, il n'est pas avocat.
--Justement c'est comme medecin que M. Saniel peut sauver Florentin.
Il sait que Caffie a ete tue sans lutte entre lui et son assassin,
consequemment sans arrachement du bouton. Qu'il le dise, qu'il le prouve
au juge d'instruction et l'innocence de Florentin est demontree. Je vais
chez lui.
--Je t'en prie, ne me laisse pas seule trop longtemps.
--Je reviens tout de suite.
Ce fut en courant que Philis descendit des Batignolles a la rue
Louis-le-Grand. A son coup de sonnette saccade, Joseph qui avait repris
sa place dans l'antichambre, ouvrit vivement, et, comme Saniel n'avait
personne, elle entra tout de suite dans son cabinet.
--Qu'as-tu? demanda-t-il en voyant son agitation.
--Mon frere est arrete.
--Ah! le pauvre garcon.
Ce que Saniel avait dit a Philis pour expliquer que cette arrestation ne
pouvait pas avoir lieu etait sincere, il le croyait, et meme il faisait
plus que de le croire, il le voulait. Quand il s'etait decide a
supprimer Caffie, il n'avait pas admis que la justice put jamais
decouvrir un coupabl
|