suivante, autour de laquelle
etoient ranges trente esclaves, tous debout. Pour lui, il etoit dans un
coin, assis sur un tapis par terre, selon la coutume du pays, vetu de drap
d'or cramoisi, et le coude appuye sur un carreau d'une autre sorte de drap
d'or. Pres de lui etoit son epee; en avant, son chancelier debout, et
autour, a peu de distance, trois hommes assis.
D'abord on fit passer sous ses yeux les presens, qu'il parut a peine
regarder; puis l'ambassadeur entra accompagne d'un trucheman, parce qu'il
ne savoit point la langue Turque. Quand il eut fait sa reverence, le
chancelier lui demanda la lettre dont il etoit porteur, et la lut tout
haut. L'ambassadeur alors dit au roi, par son trucheman, que le roi de
Cypre envoyoit le saluer, et qu'il le prioit de recevoir avec amitie les
presens qu'il lui envoyoit.
Le roi ne lui repondit pas un mot. On le fit asseoir par terre, a leur
maniere, mais audessous des trois personnes assises, et assez loin du
prince. Alors celui-ci demanda comment se portoit son frere le roi de
Cypre, et il lui fut repondu qu'il avoit perdu son pere, qu'il envoyoit
renouveler l'alliance qui du vivant du mort, avoit subsiste entre les deux
pays, et que pour lui il la desiroit fort. Je la souhaite egalement, dit le
roi.
Celui-ci demanda encore a l'ambassadeur quand etoit mort le defunt, quel
age avoit son successeur, s'il etoit sage, si son pays lui obeissoit bien;
et comme a ces deux dernieres questions la reponse fut un oui, il temoigna
en etre bien-aise.
Apres ces paroles on dit a l'ambassadeur de se lever. Il obeit, et prit
conge du roi, qui ne se remua pas plus a son depart qu'il ne l'avoit fait a
son arrivee. En sortant il trouva devant le palais les chevaux qui
l'avoient amene. On lui en fit de nouveau monter un pour le reconduire a sa
demeure; mais a peine y fut-il arrive que les huissiers d'armes se
presenterent a lui. En pareilles ceremonies, c'est la coutume qu'on leur
distribue de l'argent, et il en donna.
Il alla ensuite saluer le fils aine du roi, et lui presenter ses presens et
ses lettres. Ce prince etoit, comme son pere, entoure de trois personnes
assises. Mais quand l'ambassadeur lui fit la reverence, il se leva, se
rassit, le fit asseoir a son tour au-dessus des trois personnages. Pour
nous autres qui l'accompagnions, on nous placa bien en arriere. Moi j'avois
appercu a l'ecart un banc, sur lequel j'allai me mettre sans facon; mais on
vint m'en tirer, et il me fallut p
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