employa ainsi a se laver tout le temps de la route
jusqu'a midi, et il fut gueri entierement.
De Larande nous allames a Qulongue, appelee par les Grecs Quhonguopoly.
[Footnote: Plus bas le copiste a ecrit Quohongue et Quhongue. J'ecrirai
desormais Couhongue.] Il y a d'un lien a l'autre deux journees. Le pays est
beau et bien garni de villages; mais il manque d'eau, et n'a, ni d'autres
arbres que ceux qu'on a plantes pres des habitations pour avoir du fruit,
ni d'autre riviere que celle qui coule pres de la ville.
Cette ville, grande, marchande, defendue par des fosses en glacis et par de
bonnes murailles garnies de tours, est la meilleure qu'ait le karman. Il
lui reste un petit chateau. Jadis elle en avoit un tres-fort, qui etoit
construit au centre. On l'a jete bas pour y batir le palais du roi.
[Footnote: L'auteur, d'apres ses prejuges Europeens, emploie ici le mot roi
pour designer le prince, le souverain du pays.]
Je restai la quatre jours, afin de donner le temps a l'ambassadeur de
Cypre, et a la caravane d'arriver. Il arriva, ainsi qu'elle. Alors j'allai
demander a l'ambassadeur que, quand il iroit saluer le karman, il me permit
de me joindre a sa suite, et il me promit. Cependant il avoit parmi ses
esclaves quatre Grecs de Cypre renegats, dont l'un etoit son huissier
d'armes, et qui tous quatre firent aupres de lui des efforts pour l'en
detourner; mais il leur repondit qu'il n'y voyoit point d'inconvenient:
d'ailleurs j'en avois temoigne tant d'envie qu'il se fit un plaisir de
m'obliger.
On vint le prevenir de l'heure a laquelle il pourroit faire sa reverence au
roi, lui exposer le sujet de son ambassade, et offrir ses presens; car
c'est une coutume au-dela des mers qu'on ne paroit jamais devant un prince
sans en apporter quelques-uns. Les siens etoient six pieces de camelot de
Cypre, je ne sais combien d'aunes d'ecarlate, une quarantaine de pains de
sucre, un faucon pelerin et deux arbaletes, avec une douzaine de vires.
[Footnote: Vives, grosses fleches qu se lancoient avec l'arbalete.]
On envoya chez lui des genets pour apporter les presens; et, pour sa
monture ainsi que pour sa suite, les chevaux qu'avoient laisses a la porte
du palais ceux des grands qui etoient venus faire cortege au roi pendant la
ceremonie.
Il en monta un, et mit pied a terre a l'entree du palais; apres quoi, nous
entrames dans une tres-grande salle ou il pouvoit y avoir environ trois
cents personnes. Le roi occupoit la chambre
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