voit
envoye son fils au roi d'Ayne, avec de grands tresors; mais, apres la
destruction de la ville, le roi, tant par crainte des Grecs que par
convoitise des tresors, fit mourir le jeune prince.
A Ayne je passai la Marisce sur un gros batiment, et me rendis a Macry,
autre ville maritime a l'occident de la premiere, et habitee de Turcs et de
Grecs. Elle est pres de l'ile de Samandra, qui appartient au seigneur
d'Ayne, et elle paroit avoir ete autrefois tres-considerable; maintenant
tout y est en ruines, a l'exception d'une partie du chateau.
Caumissin, qu'on trouve ensuite apres avoir traverse une montagne, a de
bons murs, qui la rendent assez forte, quoique petite. Elle est sur un
ruisseau, en beau et plat pays, ferme par d'autres montagnes a l'occident,
et ce pays s'etend, dans un espace de cinq a six journees, jusqu'a Lessere.
Missy fut egalement et forte et bien close: mais une partie de ses murs
sont abattus; tout y a ete detruit, et elle n'a point d'habitans.
Peritoq, ville ancienne et autrefois considerable, est sur un golfe qui
s'avance dans les terres d'environ quarante milles, et qui part de
Monte-Santo, ou sont tant de caloyers. Elle a des Grecs pour habitans, et
pour defense de bonnes murailles, qui cependant sont entamees par de
grandes breches. De la, pour aller a Lessere, le chemin est une grande
plaine. C'est pres de Lessere, dit-on, que se livra la grande bataille de
Thessale (de Pharsale).
Je n'allai point jusqu'a cette derniere ville. Instruits que le Turc etoit
en route, nous l'attendimes a Yamgbatsar, village construit par ses sujets.
Il n'arriva que le troisieme jour. Son escorte, quand il marchoit, etoit de
quatre a cinq cents chevaux; mais comme il aimoit passionnement la chasse
au vol, la plus grande partie de cette troupe etoit composee de fauconniers
et d'ostriciers (autoursiers), gens dont il faisoit un grand cas, et dont
il entretenoit, me dit-on, plus de deux mille. Avec ce gout il ne faisoit
que de petites journees, et ses marches n'etoient pour lui qu'un objet
d'amusement et de plaisir.
Il entra dans Yamgbatsar avec de la pluie, n'ayant pour cortege qu'une
cinquantaine de cavaliers avec douze archers, ses esclaves, qui marchoient
a pied devant lui. Son habillement etoit une robe de velours cramoisi,
fourree de martre zibeline, et sur la tete il portoit, comme les Turcs, un
chapeau rouge; mais, pour se garantir de la pluie, par-dessus sa robe il en
avoit mis une autre de velours,
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