elles avoient
par-devant et par-derriere de hauts arcons qui, par les points d'appui
qu'ils leur fournissoient, leur donnoient bien plus de moyens de resister
au coup de lance que les petits chevaux et les selles basses des Hongrois;
et voila pourquoi notre auteur dit que c'est dans les joutes Hongroises
qu'on peut reconnoitre le cavalier qui sait bien se tenir en selle.]
Quand ils joutent a l'estrivee pour des verges d'or, tous les chevaux sont
de meme hauteur; toutes les selles sont pareilles et tirees au sort, et
l'on joute par couples toujours paires, un contre un. Si l'un des deux
adversaires tombe, le vainqueur est oblige de se retirer, et il ne joute
plus.
Jusqu'a Bude j'avois toujours accompagne l'ambassadeur de Milan; mais,
avant de quitter la ville, il me prevint qu'en route il se separeroit de
moi pour se rendre aupres du duc. D'apres cette annonce j'allai trouver mon
Artesien Clays Davion, qui me donna, pour Vienne en Autriche, une lettre de
recommendation adressee a un marchand de sa connoissance. Comme je m'etois
ouvert a lui, et que je n'avois cru devoir lui cacher ni mon etat et mon
nom, ni le pays d'ou je venois, et l'honneur que j'avois d'appartenir a
monseigneur le duc (duc de Bourgogne), il mit tout cela dans la lettre a
son ami, et je m'en trouvai bien.
De Bude je vins a Thiate, ville champetre ou le roi se tient volontiers, me
dit-on; puis, a Janiz, en Allemand Jane, ville sur le Danube. Je passai
ensuite devant une autre qui est formee par une ile du fleuve, et qui avoit
ete donnee par l'empereur a l'un des gens de monseigneur de Bourgogne, que
je crois etre messire Renier Pot. Je passai par celle de Brut, situee sur
une riviere qui separe le royaume de Hongrie d'avec le duche d'Autriche. La
riviere coule a travers un marais ou l'on a construit une chaussee longue
et etroite. Ce lieu est un passage d'une grande importance; je suis meme
persuade qu'avec peu de monde on pourroit le defendre et le fermer du cote
de l'Autriche.
Deux lieues par-dela Brut l'ambassadeur de Milan se separa de moi: il se
rendit vers le duc son maitre, et moi a Vienne en Autriche, ou j'arrivai
apres cinq jours de marche.
Entre dans la ville, je ne trouvai d'abord personne qui voulut me loger,
parce qu'on me prenoit pour un Turc. Enfin quelqu'un, par aventure,
m'enseigna une hotellerie ou l'on consentit a me recevoir. Heureusement
pour moi le domestique que j'avois pris a Pest savoit le Hongrois et le
haut Allemand
|