ecs s'etoient
empares de ce lieu; mais ils l'avoient perdu par leur lachete.
On y apprete les pieds de mouton avec une perfection et une proprete que je
n'ai vues nulle part. Je m'en regalai d'autant plus volontiers que depuis
Couhongue je n'avois pas mange de viande cuite. On y fait aussi, avec des
noix vertes, un mets particulier. Pour cela on les pele, on les coupe en
deux, on les enfile avec une ficelle, et on les arrose de vin cuit, qui se
prend tout autour et y forme une gelee comme de la colle. C'est une
nourriture assez agreable, sur-tout quand on a faim. Nous fumes obliges d'y
faire une provision de pain et de fromage pour deux jours; et je conviens
que j'etois degoute de chair crue.
Ces deux jours furent employes a venir de Carassar a Cotthay. Le pays est
beau, bien arrose et garni de montagnes peu elevees. Nous traversames un
bout de foret qui me parut remarquable en ce qu'elle est composee
entierement de chenes, et que ces arbres y sont plus gros, plus droits et
plus hauts que ceux que j'avois ete a portee de voir jusque-la. D'ailleurs
ils n'ont, comme les sapins, de branches qu'a leurs cimes.
Nous vinmes loger dans un caravanserai qui etoit eloigne de toute
habitation. Nous y trouvames de l'orge et de la paille, et il eut ete
d'autant plus aise de nous en approvisionner, qu'il n'y avoit d'autre
gardien qu'un seul valet. Mais on n'a rien de semblable a craindre dans ces
lieux-la, et il n'est point d'homme assez hardi pour oser y prendre une
poignee de marchandise sans payer.
Sur la route est une petite riviere renommee pour son eau Hoyarbarch alla
en boire avec ses femmes; il voulut que j'en busse aussi, et lui-meme m'en
presenta dans son gobelet de cuir. C'etoit la premiere fois de toute la
route qu'il me faisoit cette faveur.
Cotthay, quoique assez considerable, n'a point de murs; mais elle a un beau
et grand chateau compose de trois forteresses placees l'une au-dessus de
l'autre sur le penchant d'une montagne, lequel a une double enceinte. C'est
dans cette place qu'etoit le fils aine du grand-Turc.
La ville possede un caravanserai ou nous allames loger. Deja il y avoit des
Turcs, et nous fumes obliges d'y mettre tous nos chevaux pele-mele, selon
l'usage; mais le lendemain matin, au moment ou j'appretois le mien pour
partir, je m'apercus qu'on m'avoit pris l'une des courroies qui me servoit
a attacher derriere ma selle le tapis et autres objets que je portois en
trousse.
D'abord je criai et m
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