tit du groupe, et fit trois pas au-devant du messager.
Roland se fit reconnaitre, raconta comment il se trouvait parmi
les blancs, et transmit la proposition de Cadoudal au general
Hatry.
Comme l'avait prevu le jeune homme, celui-ci refusa.
Roland revint vers Cadoudal, le coeur joyeux et fier.
-- Il refuse! cria-t-il d'aussi loin que sa voix put se faire
entendre.
Cadoudal fit un signe de tete annoncant qu'il n'etait aucunement
etonne de ce refus.
-- Eh bien, dans ce cas, dit-il, portez-lui ma seconde
proposition; je ne veux avoir rien a me reprocher, ayant a
repondre a un juge d'honneur comme vous.
Roland s'inclina.
-- Voyons la seconde proposition? dit-il
-- La voici: le general Hatry viendra au-devant de moi, dans
l'espace qui est libre entre nos deux troupes; il aura les memes
armes que moi: c'est-a-dire son sabre et deux pistolets, et la
question se decidera entre nous deux; si je le tue, ses hommes se
soumettront aux conditions que j'ai dites, car, des prisonniers,
nous n'en pouvons pas faire; s'il me tue, ses hommes passeront
librement et gagneront Vannes sans etre inquietes. Ah! j'espere
que voila une proposition que vous accepteriez, colonel!
-- Aussi, je l'accepte pour moi, dit Roland.
-- Oui, fit Cadoudal; mais vous n'etes pas le general Hatry;
contentez-vous donc, pour le moment, d'etre son parlementaire, et,
si cette proposition, qu'a sa place je ne laisserais pas echapper,
ne lui agree pas encore, eh bien, je suis bon prince! vous
reviendrez, et je lui en ferai une troisieme.
Roland s'eloigna une seconde fois; il etait attendu du cote des
republicains avec une visible impatience.
Il transmit son message au general Hatry.
-- Citoyen, repondit le general, je dois compte de ma conduite au
premier consul, vous etes son aide de camp, et c'est vous que je
charge, a votre retour a Paris, de temoigner pour moi aupres de
lui. Que feriez-vous a ma place? Ce que vous feriez, je le ferai.
Roland tressaillit; sa figure prit l'expression grave de l'homme
qui discute avec lui-meme une question d'honneur.
Puis, au bout de quelques secondes:
-- General, dit-il, je refuserais.
-- Vos raisons, citoyen? demanda le general.
-- C'est que les chances d'un duel sont aleatoires: c'est que vous
ne pouvez soumettre la destinee de cent braves a ces chances;
c'est que, dans une affaire comme celle-ci, ou chacun est engage
pour son compte, c'est a chacun a defendre sa peau de son mieux.
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