apparition sur la table, ou d'un rable de
lievre ou d'un cuissot de chevreuil, prouvait que Michel tenait sa
parole a l'endroit des rondes promises.
Amelie avait donc cesse de s'inquieter de ces rondes de Michel qui
avaient lieu justement du cote oppose a celui ou elle avait craint
d'abord qu'il ne les fit.
Or, comme nous l'avons dit, trois jours apres les evenements que
nous venons de raconter, ou, pour parler plus correctement,
pendant la nuit qui suivit ce troisieme jour, ceux qui etaient
habitues a ne voir de lumiere qu'a deux fenetres du chateau des
Noires-Fontaines, c'est-a-dire a la fenetre d'Amelie au premier
etage, et a la fenetre de Charlotte au troisieme, eussent pu
remarquer avec etonnement que, de onze heures du soir a minuit,
les quatre fenetres du premier etaient eclairees.
Il est vrai que chacune d'elles n'etait eclairee que par une seule
bougie.
Ils eussent pu voir encore la forme d'une jeune fille qui, a
travers son rideau, fixait les yeux dans la direction du village
de Ceyzeriat.
Cette jeune fille, c'etait Amelie, Amelie pale, la poitrine
oppressee, et paraissant attendre anxieusement un signal.
Au bout de quelques minutes, elle s'essuya le front et respira
presque joyeusement.
Un feu venait de s'allumer dans la direction ou se perdait son
regard.
Aussitot elle passa de chambre en chambre, et eteignit les unes
apres les autres les trois bougies, ne laissant vivre et bruler
que celle qui se trouvait dans sa chambre.
Comme si le feu n'eut attendu que cette obscurite, il s'eteignit a
son tour.
Amelie s'assit pres de sa fenetre, et demeura immobile, les yeux
fixes sur le jardin.
Il faisait une nuit sombre, sans etoiles, sans lune, et cependant,
au bout d'un quart d'heure, elle vit, ou plutot elle devina une
ombre qui traversait la pelouse et s'approchait du chateau.
Elle placa son unique bougie dans l'angle le plus recule de la
chambre et revint ouvrir sa fenetre.
Celui qu'elle attendait etait deja sur le balcon.
Comme la premiere nuit ou nous l'avons vu faire cette escalade, il
enveloppa de son bras la taille de la jeune fille et l'entraina
dans la chambre.
Mais celle-ci opposa une legere resistance; elle cherchait de la
main la cordelette de la jalousie: elle la detacha du clou qui la
retenait, et la jalousie retomba avec plus de bruit que la
prudence ne l'eut peut-etre voulu.
Derriere la jalousie, elle ferma la fenetre.
Puis elle alla chercher la bougie dans
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