spece d'affaire d'honneur entre hommes d'une opinion differente,
une rencontre entre braves.
Ce n'etait pas seulement de l'or qu'on allait repandre sur la
grande route, c'etait du sang.
Ce n'etait pas aux pistolets sans balles du conducteur, manies par
les mains d'un enfant, qu'on allait avoir affaire, c'etait aux
armes mortelles de soldats habitues a s'en servir.
Au reste, on avait toute la journee qui allait s'ouvrir, et toute
celle du lendemain, pour prendre ses mesures. Montbar se contenta
donc de demander au palefrenier quel etait le postillon de service
qui devait, a cinq heures, prendre la malle a Macon et faire la
poste ou plutot les deux postes qui s'etendent de Macon a
Belleville.
Il lui recommanda en outre d'acheter quatre pitons et deux cadenas
fermant a clef.
Il savait d'avance que la malle arrivait a quatre heures et demie
a Macon, y dinait, et en repartait a cinq heures precises.
Sans doute, toutes les mesures de Montbar etaient prises d'avance,
car, ces recommandations faites a son domestique, il le congedia,
et s'endormit comme un homme qui a un arriere de sommeil a
combler.
Le lendemain, il ne se reveilla, ou plutot ne descendit qu'a neuf
heures du matin. Il demanda sans affectation a l'hote des
nouvelles de son bruyant voisin.
Le voyageur etait parti a six heures du matin, par la malle-poste
de Lyon a Paris, avec son ami le chef de brigade des chasseurs, et
l'hote avait cru entendre qu'ils n'avaient retenu leurs places que
jusqu'a Tonnerre.
Au reste, de meme que M. de Jayat s'inquietait du jeune officier,
le jeune officier, de son cote, s'etait inquiete de lui, avait
demande qui il etait, s'il venait d'habitude dans l'hotel, et si
l'on croyait qu'il consentit a vendre son cheval.
L'hote avait repondu qu'il connaissait parfaitement M. de Jayat,
que celui-ci avait l'habitude de loger a son hotel toutes les fois
que ses affaires l'appelaient a Macon, et que, quant a son cheval,
il ne croyait pas, vu la tendresse que le jeune gentilhomme avait
manifestee pour lui, qu'il consentit a s'en defaire a quelque prix
que ce fut.
Sur quoi, le voyageur etait parti sans insister davantage.
Apres le dejeuner, M. de Jayat, qui paraissait fort desoeuvre, fit
seller son cheval, monta dessus et sortit de Macon par la route de
Lyon. Tant qu'il fut dans la ville, il laissa marcher son cheval a
l'allure qui convenait a l'elegant animal; mais, une fois hors de
la ville, il rassembla les renes et
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