auras tout cela, tu viendras me le dire;
mais le plus grand silence sur mon sejour ici. Si l'on te demande
de mes nouvelles, on a recu une lettre de moi hier; je suis a
Paris, pres du premier consul.
-- C'est convenu.
Michel partit. Roland se coucha et s'endormit, laissant a Jacques
la garde du pavillon.
Lorsque Roland se reveilla, Michel etait de retour.
Il savait tout ce que son maitre lui avait recommande de savoir.
Le cavalier arrive dans la nuit devait repartir dans la soiree,
et, sur le registre des voyageurs que chaque aubergiste etait
force de tenir regulierement a cette epoque, on avait ecrit:
"Samedi, 30 pluviose, dix _heures du soir: _le citoyen Valensolle,
arrivant de Lyon, allant a Geneve."
Ainsi l'alibi etait prepare, puisque le registre faisait foi que
le citoyen Valensolle etait arrive a dix heures du soir et qu'il
etait impossible qu'il eut arrete, a huit heures et demie, la
malle a la Maison-Blanche, et qu'il fut entre a dix heures a
l'hotel de la _Belle-Alliance._
Mais ce qui preoccupa le plus Roland, c'est que celui qu'il avait
suivi une partie de la nuit, et dont il venait de decouvrir la
retraite et le nom, n'etait autre que le temoin d'Alfred de
Barjols, tue par lui en duel a la fontaine de Vaucluse, temoin
qui, selon toute probabilite, avait joue le role du fantome dans
la chartreuse du Seillon.
Les compagnons de Jehu n'etaient donc pas des voleurs ordinaires,
mais, au contraire, comme le bruit en courait, des gentilshommes
de bonne famille, qui, tandis que les nobles bretons risquaient
leur vie dans l'Ouest pour la cause royaliste, affrontaient, de
leur cote, l'echafaud pour faire passer aux combattants l'argent
recueilli a l'autre bout de la France dans leurs hasardeuses
expeditions.
XLVI -- UNE INSPIRATION
Nous avons vu que, dans la poursuite qu'il avait faite la nuit
precedente, Roland eut pu faire arreter un ou deux de ceux qu'il
poursuivait.
Il pouvait en faire autant de M. de Valensolle, qui, probablement,
faisait ce qu'avait fait Roland, c'est-a-dire prenait un jour de
repos apres une nuit de fatigue.
Il lui suffisait, pour cela, d'ecrire un petit mot au capitaine de
gendarmerie, ou au chef de brigade de dragons qui avait fait avec
lui l'expedition de Seillon: leur honneur etait engage dans
l'affaire; on cernait M. de Valensolle dans son lit, on en etait
quitte pour deux coups de pistolet, c'est-a-dire pour deux hommes
tues ou blesses, et M. de Valensoll
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