lites qu'il pouvait avoir de traverser la frontiere, se
mettait en route pour quitter la France.
On a vu a quoi leur chef occupait ses derniers instants.
Les autres, qui n'avaient point les memes liens de coeur,
faisaient ensemble dans le carrefour, splendidement eclaire, un
repas de separation et d'adieu: car, une fois hors de la France,
la Vendee et la Bretagne pacifiees, l'armee de Conde detruite, ou
se retrouveraient-ils sur la terre etrangere? Dieu le savait!
Tout a coup, le retentissement d'un coup de fusil arriva jusqu'a
eux.
Comme par un choc electrique, chacun fut debout.
Un second coup de fusil se fit entendre.
Puis, dans les profondeurs de la carriere, ces deux mots
penetrerent, frissonnant comme les ailes d'un oiseau funebre:
-- Aux armes!
Pour des compagnons de Jehu, soumis a toutes les vicissitudes
d'une vie de bandits, le repos d'un instant n'etait jamais la
paix.
Poignards, pistolets et carabines etaient toujours a la portee de
la main.
Au cri pousse, selon toute probabilite, par la sentinelle, chacun
sauta sur ses armes et resta le cou tendu, la poitrine haletante,
l'oreille ouverte.
Au milieu du silence, on entendit le bruit d'un pas aussi rapide
que pouvait le permettre l'obscurite dans laquelle le pas
s'enfoncait.
Puis, dans le rayon de lumiere projete par les torches et par les
bougies, un homme apparut.
-- Aux armes! cria-t-il une seconde, fois, nous sommes attaques!
Les deux coups que l'on avait entendus etaient la double
detonation du fusil de chasse de la sentinelle.
C'etait elle qui accourait, son fusil encore fumant a la main.
-- Ou est Morgan? crierent vingt voix.
-- Absent, repondit Montbar, et, par consequent, a moi le
commandement! Eteignez tout, et en retraite sur l'eglise; un
combat est inutile maintenant, et le sang verse serait du sang
perdu.
On obeit avec cette promptitude qui indique que chacun apprecie le
danger.
Puis on se serra dans l'obscurite.
Montbar, a qui les detours du souterrain etaient aussi bien connus
qu'a Morgan, se chargea de diriger la troupe, et s'enfonca, suivi
de ses compagnons, dans les profondeurs de la carriere.
Tout a coup, il lui sembla entendre a cinquante pas devant lui un
commandement prononce a voix basse, puis le claquement d'un
certain nombre de fusils que l'on arme.
Il etendit les deux bras en murmurant a son tour le mot: "Halte!"
Au meme instant, on entendit distinctement le commandement: "Feu!"
Ce
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