; car venu au Prado pour ecouter les confidences et les secrets
de Vimard, j'avais parle presque seul. Il rompit le premier le silence.
--Ainsi, dit-il, on ne vous a jamais fait d'ouvertures dans l'interet du
parti napoleonien?
--Jamais.
--He bien, je l'ai cru, en vous voyant a la bibliotheque, et c'est pour
savoir comment vous les aviez accueillies que je vous ai amene ici pour
tenir conseil et m'entendre avec vous.
--On vous a donc fait ces ouvertures a vous?
--Oui, a moi, comme a un grand nombre d'officiers.
--Une conspiration?
--Non, car s'il avait ete question d'une conspiration, on y aurait mis,
je pense, plus de reserve.
--C'est tout haut qu'on vous demande si vous etes disposes a appuyer le
retablissement de l'empire.
--He, mon cher, ce n'est pas cela qu'on nous demande, car, au premier
mot, beaucoup d'officiers, moins fermes que vous, tourneraient le dos
au negociateur. On nous represente seulement qu'un jour ou l'autre un
conflit eclatera entre le president de la Republique et l'Assemblee, et
l'on insiste sur les avantages qu'il y a pour l'armee a se ranger du
cote de Louis-Napoleon; en meme temps on glisse quelques mots adroits
sur les avantages personnels qui resulteront pour les officiers disposes
a prendre ce parti. Tout cela se fait doucement, habilement, par un
homme qui est l'agent du bonapartisme dans le Midi, le commandant de
Solignac.
En entendant ce nom, il m'echappa un mouvement involontaire.
--Vous le connaissez? demanda Vimard.
--Non; j'ai entendu son nom et je l'ai vu figurer dans les proces de
Strasbourg et de Boulogne.
--C'etait precisement pour savoir quel avait ete son role dans ces deux
affaires que je suis alle a la bibliotheque. Ici il se remue beaucoup,
et il n'y a pas d'officier qu'il n'ait vu a Marseille, a Toulon, a
Grenoble, a Montpellier; si vous n'arriviez pas d'Afrique, vous le
connaitriez aussi; c'est un homme que je crois tres-habile.
--Le proces le montre tel.
--S'il y a jamais un mouvement napoleonien, il tiendra tout le Midi dans
sa main, et c'est la un point tres-important, car la Provence entiere
est legitimiste ou republicaine, et l'on assure que la Societe des
montagnards y est tres-puissante. Ce qu'il y a de curieux dans cette
action du commandant de Solignac, c'est qu'elle s'exerce d'une facon
mysterieuse; on sent sa main partout, mais on ne la trouverait nulle
part, si l'on voulait la saisir. En apparence, il vit tranquillement a
Cass
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