s enverra!
[1] Pauline Viardot.
[2] Premiere edition in-12. Perrotin, 1841-1842.
CCVIII
A MADEMOISELLE DE ROZIERES, A PARIS
Nohant, 22 septembre 1841.
Chere amie,
Je ne comprends pas que vous _m'accusiez_ de vous _accuser_, quand je
vous approuve et vous plains de toute mon ame. Si je ne vous ai pas
ecrit, c'est que je ne savais ou vous adresser ma lettre, et, comme le
motif de votre absence etait une chose fort secrete, comme on ne sait
jamais ce que peut devenir une lettre qui ne va pas directement a la
personne absente, je voulais attendre votre retour a Paris pour vous
ecrire. Je vous reponds ce soir a la hate, ne voulant pas attendre la
lettre de Solange, qui mettra bien deux ou trois jours a tailler et
retailler sa plume, et ne voulant pas vous laisser dans le mauvais
sentiment de doute que vous avez sur moi.
J'ai passe la nuit a corriger des epreuves, la tete m'en craque; je ne
vous dirai donc que deux mots. Parlez-moi a coeur ouvert si cela vous
soulage, je ne me fais pas fort de vous consoler: je crois que vos
douleurs sont grandes et qu'il n'est au pouvoir de personne de les
guerir. Mais, si vous sentez le besoin de les dire, aucune affection ne
recevra vos epanchements avec plus de sollicitude que la mienne.
Ou avez-vous pris que je pouvais vous blamer? et par ou etes-vous
blamable? Je ne suis pas catholique, je ne suis pas du monde. Je ne
comprends pas une femme sans amour et sans devouement a ce qu'elle
aime. Soyez aussi prudente que possible, pour que ce monde hypocrite
et mechant ne vous fasse pas perdre l'exterieur et le necessaire de
l'existence materielle.
Mais votre vie interieure, nul n'a droit de vous en demander compte. Si
je puis quelque chose pour vous aider a lutter contre les mechants, vous
me le direz dans l'occasion, et vous me trouverez toujours. Bonsoir,
amie; parlez-moi de vous, de _lui_, de votre sante a tous deux. Ce que
vous me faites pressentir me laisse dans un grand effroi. Est-il plus
malade? est-ce vous qui le seriez?
Personne ici n'a su que vous etiez absente, je n'en ai rien dit. Je
crois que, s'il y a eu et s'il y a encore des cancans, ils viennent de
M. F..., qui ecrit toutes les semaines et qui cause toujours, par ses
lettres (je ne sais si elles contiennent des nouvelles ou des ragots),
un notable changement dans l'humeur. Je ne connais ce monsieur que de
vue; mais je le crois ecorche vif et toujours pret a en v
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