allia le convoi d'Ajaccio, qui etait sous les ordres de
Vaubois, et s'avanca dans la mer de Sicile, pour se reunir au convoi
de Civita-Vecchia, qui etait sous les ordres de Desaix. Le projet de
Bonaparte etait de se diriger sur Malte, et d'y tenter en passant une
entreprise audacieuse dont il avait de longue main prepare le succes par
des trames secretes. Il voulait s'emparer de cette ile, qui, commandant
la navigation de la Mediterranee, devenait importante pour l'Egypte,
et qui ne pouvait manquer d'echoir bientot aux Anglais, si on ne les
prevenait.
L'ordre des chevaliers de Malte etait comme toutes les institutions du
moyen-age: il avait perdu son objet, et des lors sa dignite et sa
force. Il n'etait plus qu'un abus, profitable seulement a ceux qui
l'exploitaient. Les chevaliers avaient en Espagne, en Portugal, en
France, en Italie, en Allemagne, des biens considerables, qui leur
avaient ete donnes par la piete des fideles pour proteger les chretiens
allant visiter les saints lieux. Maintenant qu'il n'y avait plus de
pelerinages de cette espece, le role et le devoir des chevaliers etaient
de proteger les nations chretiennes contre les Barbaresques, et de
detruire l'infame piraterie qui infeste la Mediterranee. Les biens de
l'ordre suffisaient a l'entretien d'une marine considerable; mais les
chevaliers ne s'occupaient aucunement a en former une: ils n'avaient que
deux ou trois vieilles fregates, ne sortant jamais du port, et quelques
galeres qui allaient donner et recevoir des fetes dans les ports
d'Italie. Les baillifs, les commandeurs, places dans toute la
chretiente, devoraient dans le luxe et l'oisivete les revenus de
l'ordre. Il n'y avait pas un chevalier qui eut fait la guerre aux
Barbaresques. L'ordre n'inspirait d'ailleurs plus aucun interet. En
France on lui avait enleve ses biens, et Bonaparte les avait fait saisir
en Italie, sans qu'il s'elevat aucune reclamation en sa faveur. On a vu
que Bonaparte avait songe deja a pratiquer des intelligences dans Malte.
Il avait gagne quelques chevaliers, et il se proposait de les intimider
par un coup d'audace, et de les obliger a se rendre; car il n'avait ni
le temps ni les moyens d'une attaque reguliere contre une place reputee
imprenable. L'ordre, qui depuis quelque temps pressentait ses dangers en
voyant les escadres francaises dominer dans la Mediterranee, s'etait mis
sous la protection de Paul Ier.
Bonaparte faisait de grands efforts pour rejoindre la division
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