rt. La negligence turque laissait leurs ravages presque toujours
impunis, et ne luttait pas mieux contre les brigands du desert qu'elle
ne savait lutter contre ses sables. Ces Arabes errans, divises en tribus
sur les deux cotes de la vallee, etaient au nombre de cent ou cent vingt
mille, et fournissaient vingt ou vingt-cinq mille cavaliers, braves,
mais bons pour harceler l'ennemi, jamais pour le combattre.
La troisieme race enfin etait celle des Turcs; mais elle etait aussi peu
nombreuse que les Cophtes, c'est-a-dire qu'elle s'elevait a deux cent
mille individus au plus. Elle se partageait en Turcs et Mameluks. Les
Turcs, venus depuis la derniere conquete des sultans de Constantinople,
etaient presque tous inscrits sur la liste des janissaires; mais on sait
qu'ils ne se font ordinairement inscrire sur ces listes que pour
avoir les privileges des janissaires, et qu'un tres petit nombre sont
reellement au service. Il n'y en avait que peu d'entre eux dans la
milice du pacha. Ce pacha, envoye de Constantinople, representait le
sultan en Egypte; mais a peine escorte de quelques janissaires, il avait
vu s'evanouir son autorite par les precautions meme que le sultan Selim
avait prises autrefois pour la conserver. Ce sultan, jugeant que par
son eloignement l'Egypte pourrait echapper a la domination de
Constantinople, qu'un pacha ambitieux et habile pourrait s'y creer un
empire independant, avait imagine un contre-poids, en instituant la
milice des Mameluks. Mais comme on ne peut pas vaincre les conditions
physiques qui rendent un pays dependant ou independant d'un autre, au
lieu du pacha, c'etaient les Mameluks qui s'etaient rendus independans
de Constantinople et maitres de l'Egypte. Les Mameluks etaient des
esclaves achetes en Circassie. Choisis parmi les plus beaux enfans du
Caucase, transportes jeunes en Egypte, eleves dans l'ignorance de leur
origine, dans le gout et la pratique des armes, ils devenaient les plus
braves et les plus agiles cavaliers de la terre. Ils tenaient a honneur
d'etre sans origine, d'avoir ete achetes cher, et d'etre beaux et
vaillans. Ils avaient vingt-quatre beys, qui etaient leurs proprietaires
et leurs chefs. Ces beys avaient chacun cinq ou six cents Mameluks.
C'etait un troupeau qu'ils avaient soin d'alimenter, et qu'ils
transmettaient quelquefois a leur fils, et plus souvent a leur Mameluk
favori, qui devenait bey a son tour. Chaque Mameluk etait servi par deux
fellahs. La milice entiere se co
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