arriva sur les bords du Nil
le 22 messidor (10 juillet), apres une marche de quatre jours. A la vue
du Nil et de cette eau si desiree, les soldats s'y precipiterent, et en
se baignant dans ses flots oublierent toutes leurs fatigues. La division
Desaix, qui de l'avant-garde etait passee a l'arriere-garde, vit galoper
devant elle deux ou trois centaines de Mameluks, qu'elle dispersa avec
quelques volees de mitraille. C'etaient les premiers qu'on eut vus.
Ils annoncaient la prochaine rencontre de l'armee ennemie. Le brave
Mourad-Bey, en effet, ayant ete averti, reunissait toutes ses forces
autour du Caire. En attendant leur reunion, il voltigeait avec un
millier de chevaux autour de notre armee, afin d'observer sa marche.
L'armee attendit a Ramanieh l'arrivee de la flottille; elle se reposa
jusqu'au 25 messidor (13 juillet), et en partit le meme jour pour
Chebreiss. Mourad-Bey nous y attendait avec ses mameluks. La flottille,
qui etait partie la premiere, et qui avait devance l'armee, se trouva
engagee avant de pouvoir etre soutenue. Mourad-Bey en avait une aussi,
et du rivage il joignait son feu a celui de ses _djermes_ (vaisseaux
legers egyptiens). La flottille francaise eut a soutenir un combat des
plus rudes. L'officier de marine Perree, qui la commandait, deploya
un rare courage; il fut soutenu par les cavaliers qui etaient arrives
demontes en Egypte, et qui, en attendant de s'equiper aux depens
des Mameluks, etaient transportes par eau. On prit deux chaloupes
canonnieres a l'ennemi, et on le repoussa. L'armee arriva dans cet
instant; elle se composait de cinq divisions. Elle n'avait pas encore
combattu contre ces singuliers ennemis. A la rapidite, au choc des
chevaux, aux coups de sabre, il fallait opposer l'immobilite du
fantassin, sa longue baionnette, et des masses faisant front de tous
cotes. Bonaparte forma ses cinq divisions en cinq carres, au milieu
desquels on placa les bagages et l'etat-major. L'artillerie etait
aux angles. Les cinq divisions se flanquaient les unes les autres.
Mourad-Bey lanca sur ces citadelles vivantes mille ou douze cents
cavaliers intrepides, qui, se precipitant a grands cris et de tout le
galop de leurs chevaux, dechargeant leurs pistolets, puis tirant leurs
redoutables sabres, vinrent se jeter sur le front des carres. Trouvant
partout une haie de baionnettes et un feu terrible, ils flottaient
autour des rangs francais, tombaient devant eux, ou s'echappaient dans
la plaine de toute l
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