de
Civita-Vecchia; il ne put la joindre qu'a Malte meme. Les cinq cents
voiles francaises se deployerent a la vue de l'ile, le 21 prairial (9
juin), vingt-deux jours apres la sortie de Toulon. Cette vue repandit
le trouble dans la ville de Malte. Bonaparte, pour avoir un pretexte de
s'arreter, et pour faire naitre un sujet de contestation, demanda au
grand-maitre la faculte de faire de l'eau. Le grand-maitre, Ferdinand de
Hompesch, fit repondre par un refus absolu, alleguant les reglemens,
qui ne permettaient pas d'introduire a la fois plus de deux vaisseaux
appartenant a des puissances belligerantes. On avait autrement accueilli
les Anglais quand ils s'etaient presentes. Bonaparte dit que c'etait la
une preuve de la plus insigne malveillance, et sur-le-champ fit ordonner
un debarquement. Le lendemain, 22 prairial (10 juin), les troupes
francaises debarquerent dans l'ile, et investirent completement
Lavalette, qui compte trente mille ames a peu pres de population, et qui
est l'une des plus fortes places de l'Europe. Bonaparte fit debarquer de
l'artillerie pour canonner les forts. Les chevaliers repondirent a son
feu, mais tres mal. Ils voulurent faire une sortie, et il y en eut un
grand nombre de pris. Le desordre se mit alors a l'interieur. Quelques
chevaliers de la langue francaise declarerent qu'ils ne pouvaient pas
se battre contre leurs compatriotes. On en jeta quelques-uns dans les
cachots. Le trouble etait dans les tetes; les habitans voulaient qu'on
se rendit. Le grand-maitre, qui avait peu d'energie, et qui se souvenait
de la generosite du vainqueur de Rivoli a Mantoue, songea a sauver ses
interets du naufrage, fit sortir de prison l'un des chevaliers francais
qu'il y avait jetes, et l'envoya a Bonaparte pour negocier. Le traite
fut bientot arrete. Les chevaliers abandonnerent a la France la
souverainete de Malte et des iles en dependant; en retour, la France
promit son intervention au congres de Rastadt, pour faire obtenir au
grand-maitre une principaute en Allemagne, et a defaut, elle lui assura
une pension viagere de 300,000 francs et une indemnite de 600,000 francs
comptant. Elle accorda a chaque chevalier de la langue francaise 700 fr.
de pension, et 1,000 pour les sexagenaires; elle promit sa mediation
pour que ceux des autres langues fussent mis en jouissance des biens de
l'ordre, dans leurs pays respectifs. Telles furent les conditions au
moyen desquelles la France entra en possession du premier port de
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