rtement creuses, la
trace d'une douleur profonde qui ne voulait pas se confesser a Dieu
meme de son crime. La grosse Chounette, debout dans un coin, sanglotait
machinalement sans offrir ses services et sans qu'on songeat a les
reclamer. Il y avait un profond decouragement sur ces trois figures. La
folle seule, lorsqu'elle ne hurlait pas, paraissait rouler de sombres
pensees de haine dans son cerveau. On entendait ronfler dans la
chambre voisine; mais ce lourd sommeil de M. Bricolin n'etait pas sans
agitation. De temps a autre il paraissait interrompu par de mauvais
reves. Plus loin encore, le long de la cloison opposee, on entendait
tousser et geindre le pere Bricolin; etranger aux souffrances des
autres, il n'avait pas trop du peu de forces qui lui restaient pour
supporter les siennes propres.
Enfin, vers trois heures du matin, la pesanteur de l'orage parut
accabler les organes excedes de la folle. Elle s'endormit par terre, et
on parvint a la mettre au lit sans qu'elle s'en apercut. Il y avait sans
doute bien longtemps qu'elle n'avait goute un instant de sommeil, car
elle s'y ensevelit profondement, et tout le monde put se reposer, meme
Rose a qui madame de Blanchemont s'empressa de porter cette meilleure
nouvelle.
Si Marcelle n'eut trouve la l'occasion de se devouer a la pauvre Rose,
elle eut maudit la malheureuse inspiration qui l'avait poussee dans
cette maison habitee par l'avarice et le malheur. Elle se fut hatee de
chercher un autre gite que celui-la, si antipathique a la poesie, si
deplaisant dans la prosperite, si lugubre dans la disgrace. Mais quelque
nouvelle contrariete qu'elle put etre exposee a y subir encore, elle
resolut d'y rester tant qu'elle pourrait etre secourable a sa jeune
compagne. Heureusement la matinee fut calme. Tout le monde s'eveilla
fort tard, et Rose dormait encore lorsque madame de Blanchemont, a
peine eveillee elle-meme, recut de Paris, grace a la rapidite des
communications actuelles, la reponse suivante a la lettre que trois
jours auparavant elle avait ecrite a sa belle-mere.
_Lettre de la comtesse de Blanchemont a sa belle-fille, Marcelle,
baronne de Blanchemont._
"Ma fille,
"Que la Providence qui vous envoie tout ce courage daigne vous le
conserver! Il ne m'etonne pas de votre part, quoiqu'il soit grand.
Ne louez pas le mien. A mon age on n'a pas longtemps a souffrir! Au
votre... heureusement, on ne se fait pas une idee nette de la longueur
et de la difficulte de l'exis
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