n'ai pas a vous en parler, vous l'avez vu, vous le voyez
comme moi tous les jours. Les choses etant ainsi, cette demande serait
faite depuis quelque temps deja, j'en suis certaine, si M. de Naurouse
n'avait ete et n'etait retenu par notre reserve: la mienne, qui est
celle d'une mere prudente, et celle de Corysandre...
--Il ne lui plait point? s'ecria Savine avec un elan de joie qu'il ne
put pas contenir.
Madame de Barizel prit une figure effarouchee et jusqu'a un certain
point scandalisee:
--Croyez-vous donc qu'on peut plaire ainsi a ma fille?
La purete de Corysandre etant sauvegardee par l'observation qu'elle
avait faite et sa dignite de mere prudente l'etant en meme temps, madame
de Barizel put continuer a pousser Savine en l'attaquant aux endroits
qu'elle savait etre les plus sensibles chez lui.
--On ne peut pas ne pas reconnaitre que M. de Naurouse ne merite la
sympathie.
--Oh! certainement.
--Sous tous les rapports.
--Certainement.
--Ainsi il est tres beau garcon.
--Je vous le disais moi-meme tout a l'heure.
--Nous sommes donc d'accord. Vous me disiez aussi qu'il etait plein de
coeur, que son caractere etait chevaleresque, enfin vous me faisiez
de lui un eloge tel que toute jeune fille qui l'aurait entendu aurait
souhaite que celui dont on parlait ainsi devint son mari.
--J'ai fait quelques reserves.
--Parce que vous etes son ami. Mais, quel que soit votre esprit de
justice ou meme plutot a cause de cet esprit de justice, vous proclamez
que c'est un des hommes les plus charmants qu'on puisse rencontrer.
Savine etait au supplice; chaque mot lui etait une blessure cruelle: un
autre que lui meritant la sympathie; un autre beau garcon (il s'etait
regarde dans la glace); un autre plein de coeur; un autre chevaleresque;
un autre l'un des hommes les plus charmants qu'on put rencontrer!
Qu'avait-il donc pour qu'on parlat de lui en ces termes, pour qu'on le
jugeat ainsi?
--Malgre toutes ces qualites, continua madame de Barizel, vous devez
comprendre que Corysandre n'est pas fille a ouvrir son coeur a un
sentiment qui ne serait pas avouable. Le duc de Naurouse a pu lui
paraitre... Comment dirais-je bien? Le mot ne me vient pas. Mais peu
importe. Enfin elle a pu le juger ce qu'il est reellement; mais de la a
dire qu'il lui plait, comme vous l'avez dit, il y a un abime qu'elle ne
franchira jamais. Non, jamais, jamais. Ce n'est pas la connaitre que de
faire une pareille supposition.
--Ce n
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