ne m'etais jure de mourir garcon.
Il se tut, tres satisfait de lui; il avait demoli Naurouse et il s'etait
lui-meme degage.
Heureusement pour lui madame de Barizel s'etait depuis longtemps exercee
a ne pas s'abandonner a son premier mouvement, car si elle avait cede
a l'indignation furieuse qui l'avait saisie, il eut entendu des choses
qui, apres les eloges et les compliments auxquels elle l'avait habitue,
l'eussent etrangement et bien desagreablement surpris. Par un energique
effort de volonte, elle se rendit maitresse d'elle-meme et refoula sa
fureur. Ah! s'il n'avait pas ete l'ami du duc de Naurouse! Mais il etait
l'ami du duc, et maintenant c'etait du cote de celui-ci qu'elle devait
se retourner, en lui qu'elle devait esperer, sur lui qu'elle devait
echafauder ses nouveaux projets; il ne fallait donc pas se faire en ce
moment de ce miserable Savine un ennemi qui pouvait etre redoutable.
XVII
Madame de Barizel, qui avait horreur du mouvement, passait sa vie
couchee ou etendue, ne quittant son canape ou son fauteuil qu'a la
derniere extremite et dans des circonstances tout a fait graves.
Cependant, lorsque Savine, qu'elle avait conduit jusqu'a la porte du
salon, ce qui chez elle etait la plus grave preuve d'estime ou d'amitie
qu'elle put donner, fut parti, au lieu de revenir s'asseoir, elle se
mit a marcher a grands pas, allant, revenant, sans savoir ce qu'elle
faisait, poussee par les mouvements desordonnes qui l'agitaient.
--Mourir garcon, repetait-elle machinalement, mourir garcon!
Pendant assez longtemps encore, elle marcha par le salon; puis, un
peu calmee, elle alla s'allonger sur un divan, et la elle continua de
reflechir.
Enfin, s'etant arretee a une resolution, elle sonna et commanda qu'on
priat Corysandre de descendre.
Celle-ci ne tarda pas a arriver, l'air ennuye.
--J'ai a te parler, dit madame de Barizel, serieusement.
--C'est de mon mariage, n'est-ce pas, qu'il va etre question? dit-elle.
--Oui.
--Helas!
--Ecoute-moi avant de te plaindre et peut-etre apres me remercieras-tu.
--Ce serait si tu voulais bien ne plus me parler de mariage que je
te remercierais, si tu savais comme je suis lasse de toutes ces
combinaisons que tu te donnes tant de peine a chercher et qui
n'aboutissent jamais, comme j'en suis humiliee.
Son beau visage s'anima, mais pour se voiler d'une expression
melancolique:
--Si tu savais comme j'en suis malheureuse.
--Eh bien je ne veux pas que cela
|