llerai son education. Enfin, plus tard, je l'aiderai a entrer dans
la vie et lui laisserai par testament, ce qui me reste de fortune, car
il sera ton fils, c'est-a-dire mon petit neveu, et je ferai pour lui ce
que tu ne pourrais pas faire toi-meme. Peut-etre dira-t-on, peut-etre
croira-t-il qu'il est mon fils; mais cela sera sans importance je peux,
moi, avoir un enfant naturel. Tu vois que j'ai tout prevu, ou a peu
pres.
VI
Pour eviter les questions et les observations de lady Cappadoce, M. de
Chambrais voulut que Ghislaine ecrivit a celle-ci leur projet de voyage
en Italie. En presence d'un plan arrete, il n'y aurait rien a dire.
Mais il la connaissait mal: elle eut a dire, au contraire, et beaucoup.
--Pourquoi l'Italie apres la Hollande? Que voulait-on cacher sous ces
voyages qui s'enchainaient sans raison? Etait-ce un pretexte pour lui
faire comprendre qu'on n'avait plus besoin de ses services? S'il en
etait ainsi, pourquoi ne pas s'expliquer franchement? Elle n'etait pas
femme a s'imposer.
Aux premieres questions, Ghislaine avait ete decontenancee; mais ce
souci egoiste de ramener tout a soi la tira d'embarras: comme il n'avait
jamais ete question de se priver des services de lady Cappadoce, elle
put demontrer avec la persuasion de la verite que cette idee ne reposait
sur aucun fondement; elle allait en Italie parce que son oncle qui,
avait pris plaisir a lui montrer la peinture flamande et hollandaise,
voulait maintenant lui montrer la peinture italienne, voila tout;
c'etait bien simple; et il fallut que lady Cappadoce se contentat de ces
explications.
Repoussee de ce cote, elle se tourna vers M. de Chambrais a qui elle
essaya de presenter des objections de convenance sur ce long tete-a-tete
entre un homme jeune encore et une toute jeune fille, mais elle fut
recue de telle sorte qu'elle dut renoncer a se mettre en tiers dans ce
tete-a-tete comme elle l'aurait desire.
Evidemment on ne voulait pas d'elle; si bizarre, si extraordinaire que
cela fut, il fallait qu'elle le reconnut, et elle ne s'expliqua cette
bizarrerie que par la haute competence qu'elle s'attribuait dans les
questions d'art: jaloux de cette competence, M. de Chambrais, qui etait
un ignorant presomptueux--comme tous les Francais d'ailleurs--prenait
ses precautions pour n'avoir pas a subir, a chaque pas, des lecons qui
l'auraient humilie.
Que faire a cela? Il n'y avait pour elle que deux partis a prendre:
se soumettre ou se fache
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