ui etaient de braves gens,
honnetes, reguliers dans leurs habitudes, propres, soigneux, qui ne
faisaient aucune difference entre elle et leurs vrais enfants.
Enfin l'institutrice qui la faisait travailler etait celle-la meme qui
l'avait elevee, un peu seche il est vrai, rigide, austere, cependant
pleine des plus hautes qualites.
Mais etait-ce assez!
Quand dans cet entretien elle avait dit a Claude qu'on n'a pas toujours
un pere et une mere, l'enfant lui avait repondu d'un mot qui ravivait
tous ses doutes: "Vous avez connu les votres."
Qui savait l'influence que le souvenir de ce pere et de cette mere aimes
et respectes avait eu sur sa destinee, tandis que Claude seule, depuis
sa naissance, ne subissait que celle de la nature?
IV
Quand Ghislaine avait ete un jour a la maison de Dagomer pour voir
Claude, elle se promettait de ne pas y retourner le lendemain; il ne
fallait pas appeler l'attention sur ces visites qui, trop repetees,
deviendraient inexplicables; elle devait etre prudente, elle voulait
l'etre. Mais elle avait beau dire, elle avait beau faire, toujours une
raison nouvelle s'imposait pour qu'elle ne tint pas la parole qu'elle
s'etait donnee et manquat a sa promesse.
Elle n'entrerait pas: elle passerait et ne jetterait qu'un rapide
coup d'oeil dans la maison; elle n'echangerait qu'un mot avec Claude;
peut-etre meme ne lui dirait-elle rien; la voir suffirait.
Et de meme qu'elle n'avait pas tenu sa promesse de ne pas aller a la
maison du garde, de meme elle ne tenait pas celle du rapide coup d'oeil
et du seul mot. Arrivee devant la maison, elle entrait, s'asseyait, et
le temps passait sans qu'elle en eut conscience: toujours elle avait des
questions a adresser a Claude, des recommandations a lui faire.
Elle avait bien essaye de la rencontrer chez lady Cappadoce a l'heure
des lecons, sous pretexte de savoir comment elle travaillait, mais elle
avait du y renoncer bientot. Chez les Dagomer, on pouvait s'etonner
qu'elle vint si souvent, mais c'etait tout, on n'allait pas au dela de
cet etonnement, on ne l'observait pas avec des yeux capables de voir ce
qu'on ne leur montrait pas. Tandis que chez lady Cappadoce, il en etait
autrement.
La premiere fois, la gouvernante avait ete flattee que l'ancienne eleve
voulut assister a la lecon de la nouvelle, et elle avait donne a cette
lecon une importance considerable--elle avait pionne. Mais a la seconde
elle avait ete surprise. A la troisieme, son esp
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