e le retint, ne voulant pas
paraitre intervenir dans le choix des invites de son oncle.
--N'est-il pas a craindre, demanda-t-elle, que M. d'Unieres vous
entretienne des intentions qu'il avait il y a un an?
--Il ne peut pas ne pas m'en entretenir.
--Alors?
--Je repondrai ce que tu voudras.
--Vous sentez comme moi que ce mariage est impossible.
--J'ai mes idees a ce sujet qui peuvent differer des tiennes; mais
puisque tu trouves qu'il est impossible, je le dirai; seulement ce ne
sera pas dans ces termes, car, possible il y a un an, il ne peut pas
etre devenu tout a coup impossible. Il faudrait des raisons et je
n'en ai pas a donner. Je m'en tirerai donc tant bien que mal par des
echappatoires; les medecins conseillent de ne pas te marier trop jeune;
enfin je gagnerai du temps.
--Il faudra toujours se prononcer a un certain moment.
--Il peut arriver que d'Unieres comprenne qu'on ne veut pas de lui et
qu'alors il se retire.
--Et s'il ne se retire pas?
--S'il ne se retire pas, c'est qu'il t'aime d'un sentiment serieux,
profond, et dans ce cas ce sera a toi de voir comment tu veux repondre
a cet amour. Mais pour le moment nous n'avons pas a nous preoccuper de
cela. En vertu de certaines idees, dont je sens toute la force, tu crois
devoir renoncer a ton mariage avec d'Unieres....
--Avec lui et avec tout autre.
--Il ne s'agit que de lui presentement; si je ne romps pas ce mariage
brusquement, parce que je ne pourrais le faire qu'en te compromettant ou
en blessant d'Unieres, je l'ajourne, et c'est, il me semble l'essentiel.
Ce ne fut, en effet, que d'un simple ajournement qu'il fut question
entre M. de Chambrais et le comte d'Unieres, et les raisons les
meilleures s'enchainerent pour le justifier:
Si M. de Chambrais avait accueilli avec empressement ce projet de
mariage, c'etait d'abord par estime et par amitie pour le mari qui se
presentait, et ensuite parce qu'il trouvait qu'a dix-huit ans Ghislaine
etait parfaitement en age de se marier. Mais quand l'indisposition qui
avait necessite leur voyage en Italie l'avait mis en relations avec des
medecins, il etait revenu sur cette opinion.
S'il est des jeunes filles qui peuvent sans inconvenient se marier a
dix-huit ans et meme a seize, il en est d'autres pour lesquelles les
mariages precoces sont dangereux, et qui, avant de s'exposer aux
fatigues de la maternite, doivent attendre leur complet developpement
qui, pour la Francaise, n'a lieu qu'entre
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