dee par ce rire.
--Et qui t'a parle du Bois? demanda-t-elle du meme ton affectueux.
--C'est lady Cappadoce.
--A propos de quoi?
--Quand je ne me tiens pas bien, que je chiffonne ma robe ou casse mon
col, elle me dit: "Vous ferez vraiment belle figure au Bois, si vous
vous tenez ainsi."
--Tu voudrais aller au Bois?
--Oh! oui.
--Pourquoi faire?
--Pour me promener donc, pour voir.
--Tu t'ennuies ici?
--Je ne resterai pas toujours ici, j'irai au couvent.
--Les filles qui sont au couvent ne vont pas au Bois.
--Je ne resterai pas toujours au couvent.
--Certes, non; a moins que tu ne le veuilles.
--Je ne le voudrai pas; je me marierai.
--Ah! tu penses a te marier?
--Mais oui, quelquefois, et meme souvent, je voudrais avoir un mari pour
qu'il m'aime. Vous savez, moi, je n'ai ni pere ni mere, et je voudrais
etre aimee.
--Moi, je t'aime!
--Vous etes la comtesse d'Unieres!
Elle dit cela avec un ton d'admiration et de respect, en petite fille
habituee a se faire une idee presque surnaturelle, religieuse, de cette
comtesse d'Unieres si loin d'elle.
Ghislaine fut remuee jusque dans les entrailles; c'etait donc vrai
qu'elle etait bien loin de cette enfant, que celle-ci, dans son
ignorance, n'admettait meme pas que cette distance put etre jamais
franchie.
Elle jeta un regard autour d'elle. Au dehors, on n'entendait d'autre
bruit que celui de la brise dans le feuillage des grands arbres;
personne dans la maison, Claude l'avait dit. Alors elle eut une
faiblesse, elle qui toujours s'etait si rigoureusement observee;
d'un mouvement passionne, elle attira sa fille sur sa poitrine et,
longuement, elle l'embrassa, murmurant des mots que Claude, surprise, ne
comprenait pas.
Puis tout a coup le sentiment de la realite lui revenant, elle s'arreta
brusquement, et sans repousser l'enfant, elle cessa de l'embrasser.
--Je t'assure que je t'aime, ma petite Claude, et Dagomer aussi t'aime
bien.
--C'est vrai, mais il n'est pas mon pere.
--On n'a pas toujours une mere et un pere; a ton age je n'avais plus les
miens.
--Oui, mais vous les aviez connus, tandis que moi....
C'etait la un sujet trop douloureux pour que Ghislaine voulut le
continuer, chaque parole de Claude lui etait une blessure.
--Mais que sens-tu donc? demanda-t-elle plutot pour changer l'entretien
que par curiosite reelle, quelle etrange odeur!
Claude se troubla.
--Ce n'est ni celle d'une fleur, ni celle d'un fruit. E
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