ts une petite fille
qui leur a ete confiee... la tienne.
--Vous voulez....
--Non, je ne voudrais pas, mais enfin j'ai combine cet arrangement pour
enlever ton consentement. Aussitot mariee, tu pars pour l'Espagne, ou tu
visites tes parents, et ou ton mari fait sa Couverture et remplit ses
devoirs aupres du Roi. Moi, pendant ce temps, je vais a Palerme, je
ramene Claude, je la confie aux Dagomer, que j'emmenage ici, et quand
tu reviens tu peux voir l'enfant a ton gre, en attendant que nous
l'envoyions a Paris pour son education.
--Oh! mon oncle, mon oncle.
--Autorise-moi a telegraphier a d'Unieres, et tout cela se realise, tu
fais d'un mot notre bonheur a tous le sien, le tien, le mien et celui de
Claude.
Comme elle ne repondait pas et qu'il la regardait pour lire en elle, il
la vit fremissante.
--Qu'as-tu?
--J'ai peur.
--De quoi!
--Je ne sais pas, de quelque malheur, d'une punition.
--De quoi pourrais-tu etre punie? Quant a ce malheur que tu veux
prevoir, il ne pourrait arriver que si tu t'abandonnais, et tu ne
t'abandonneras pas, puisque tu aimeras ton mari.
Comme elle ne repondait pas, il se mit a une table sur laquelle se
trouvaient un encrier et une plume.
--J'ecris la depeche, dit-il.
FIN DE LA DEUXIEME PARTIE
TROISIEME PARTIE
I
Dix ans s'etaient ecoules depuis le mariage de Ghislaine; et ces dix
annees avaient passe pour elle comme pour son mari rapides, legeres,
embellies de tout ce que la fortune, la consideration, l'elevation du
rang peuvent donner de joies et de confiance.
Elle aimait son mari d'un amour passionne.
Le comte idolatrait sa femme.
Et la fierte qu'ils avaient l'un de l'autre les maintenait dans un
etat d'enthousiasme qui melait toujours a leur tendresse une part
d'exaltation.
Non seulement ils ne connaissaient pas la lassitude du mariage, mais ils
n'en connaissaient pas le calme.
Une separation de quelques jours exigee par les necessites de la
politique les angoissait comme un malheur; pendant ces separations
ils s'ecrivaient des lettres d'amants toutes pleines d'une tendresse
passionnee, et jamais il ne revenait d'une absence sans qu'elle courut
au-devant de lui et sans que leur premier regard, leur premiere etreinte
ne leur donnassent un vertige.
Memes idees, memes gouts, meme esprit, meme education; ils n'etaient
vraiment qu'un, se comprenant avec le geste le plus fugitif, avec un
regard, exprimant bien souvent ensemble la meme
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